L'accord du salarié est-il nécessaire en cas de changement de ses conditions de travail ?

en sorte qu'en ne se présentant pas sur son nouveau lieu de travail, la salariée avait commis un abandon de poste caractérisant une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé.....

L’accord du salarié est-il nécessaire en cas de changement de ses conditions de travail ?

Une nouvelle répartition des horaires de travail et le changement du lieu de travail constituent un simple changement des conditions de travail, et ne nécessitent pas l’accord du salarié.
Selon un Arrêt de rejet de la Cour de Cassation rendu le 28/05/2015, le fait de modifier la répartition des horaires du salarié et son lieu de travail dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail, et non une modification du contrat de travail. A ce titre, l’accord du salarié n’est pas indispensable, et celui-ci, s’il ne se présente pas à son poste, peut se voir licencié pour abandon de poste constitutif d’une faute grave.

 

L'accord du salarié est-il nécessaire en cas de changement de ses conditions de travail ?

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Arrêt de la Cour de Cassation, Sociale, rendu le 28/05/2015, rejet (14-13166)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 26 mars 2013), que Mme X…, engagée à compter du 3 mars 2009 en qualité de démonstratrice par la société Aquitaine bougie industrie selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, a été licenciée le 18 juin 2010 pour refus abusif d’un changement des conditions de travail et abandon de poste ; que la société a été placée en liquidation judiciaire le 12 octobre 2011, la société Montravers et Yang-Ting étant désignée en qualité de liquidateur ;

Attendu que la salariée fait grief à l’arrêt de dire justifié son licenciement pour faute grave et de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement fixe les termes et les limites du litige ; que pour dire que le licenciement reposait sur une faute grave, la cour d’appel a retenu que la nouvelle répartition horaire avait été acceptée dans son principe par la salariée le 6 avril 2010 et que cette nouvelle répartition horaire était compatible avec les autres engagements professionnels et adaptées à la vie familiale de la salariée, d’une part, que le nouveau lieu de travail était situé dans le même secteur géographique, d’autre part, que dans ces conditions, la mutation géographique imposée par l’employeur constituait un changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail lui-même et que, par conséquent, en ne se présentant pas sur son nouveau lieu de travail, la salariée a bien commis un abandon de poste ; qu’en statuant ainsi, alors que dans la lettre de licenciement, l’employeur ne reprochait pas à la salariée de ne pas avoir pris le travail sur le nouveau lieu de travail selon les nouveaux horaires acceptés mais, au contraire, de ne pas avoir repris ses fonctions sur le nouveau lieu de travail aux conditions initiales, soit avec des horaires incompatibles avec les autres obligations professionnelles de la salariée, d’une part, de ne pas avoir accepté le principe de régulariser un avenant au contrat de travail afin d’entériner la nouvelle répartition horaire, d’autre part, la cour d’appel a modifié les termes du litige tels qu’il résulte de la lettre de licenciement, et a, ce faisant, violé l’article L. 1232-6 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil ;

2°/ que s’agissant du refus de reprendre les fonctions sur le nouveau lieu aux conditions initiales, la cour d’appel a constaté que la mutation géographique avec maintien des horaires antérieurs ne permettait pas à la salariée d’exercer ses activités auprès de ses autres employeurs, en sorte qu’elle était en droit de la refuser ; qu’en disant son refus constitutif d’une faute grave, la cour d’appel a violé les articles L. 1222-6 et L. 1233-3 du code du travail ;

3°/ que les juges ne peuvent modifier les termes du litige tels que déterminés par les prétentions des parties fixées par leurs conclusions ; que pour dire le licenciement fondé sur une faute grave, la cour d’appel a retenu que la nouvelle répartition horaire avait été acceptée dans son principe par la salariée le 6 avril 2010 et que cette nouvelle répartition horaire était compatible avec les autres engagements professionnels et adaptées à la vie familiale de la salariée, d’une part, que le nouveau lieu de travail était situé dans le même secteur géographique, d’autre part, que dans ces conditions, la mutation géographique imposée par l’employeur constituait un changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail lui-même et que, par conséquent, en ne se présentant pas sur son nouveau lieu de travail, la salariée a bien commis un abandon de poste ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait des conclusions que les parties avaient soutenu devant elle que la salariée, qui avait refusé de signer un avenant portant modification de la répartition de la durée du travail à temps partiel, n’avait pas accepté la nouvelle répartition horaire, en sorte que l’employeur reconnaissait que cette modification constituait une modification du contrat de travail nécessitant son accord, la cour d’appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé l’article [4] du code de procédure civile ;

/ qu’en conséquence s’agissant du refus de régulariser un avenant afin d’entériner une nouvelle répartition horaire, en disant fautif le refus d’accepter une modification du contrat, la cour d’appel a violé les articles L. 1222-6 et L. 1233-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

5°/ qu’en toute hypothèse, et à admettre qu’il puisse être fait grief à la salariée de n’avoir pas exécuté le contrat modifié, la modification du contrat de travail nécessite l’acceptation claire et non équivoque du salarié, celle-ci ne pouvant être déduite d’un accord de principe du salarié suivi d’une contreproposition par l’employeur, du refus du salarié de signer un avenant formalisant cette modification et d’une saisine du juge prud’homale ; que pour dire que le licenciement reposait sur une faute grave, après avoir relevé que le 10 mars 2010, l’employeur demandait à la salariée de lui faire une proposition d’horaires compatibles avec ses autres engagements et que dans une lettre datée du 29 mars 2010, l’employeur se référant à un entretien du 16 mars exprimait son accord pour que la salariée puisse exécuter ses 8 heures de travail sur une seule journée de 9 heures 30 à 18 heures 00 avec 30 minutes de pause-repas à charge pour la salariée de préciser le “jour de son choix”, la cour d’appel a retenu que par lettre recommandée en date du 6 avril 2010 la salariée faisait savoir à la société Aquitaine bougie industrie qu’elle choisissait comme jour de travail le mercredi puis, le mardi à partir du 1er septembre 2010, date de scolarisation de son fils, que la nouvelle répartition horaire avait été acceptée dans son principe par la salariée le 6 avril 2010 ; qu’en statuant comme elle l’a fait sans caractériser une acceptation claire et non équivoque de la salariée de la modification de son contrat de travail et alors que par lettre datée du 16 avril 2010, soit postérieure aux courriers du 29 mars et 6 avril, l’employeur avait fait une contreproposition puisqu’il avait proposé à la salariée d’exécuter une journée de travail de 10 heures 00 à 18 heures 00 avec 30 minutes de pause repas, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil ;

6°/ qu’en tout cas, la modification du contrat de travail, proposée par l’employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié est réputée fondée sur un motif économique ; qu’il en résulte que l’employeur qui n’a pas respecté les formalités prescrites par l’article L. 1222-6 du code du travail ne peut se prévaloir ni d’un refus ni d’une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié ; qu’en écartant l’application de ces règles, dont la salariée se prévalait, sans avoir recherché si la modification de la répartition de la durée du travail à temps partiel n’avait pas été dictée par un motif économique, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1222-6 et L. 1233-3 du code du travail ;

Mais attendu que, sans méconnaître les termes du litige, la cour d’appel, qui a constaté que le nouveau lieu de travail de la salariée, situé à 12 kilomètres de l’ancien lieu d’exécution du contrat, était desservi par les transports collectifs et situé dans le même secteur géographique, et qui a relevé que la nouvelle répartition horaire acceptée par la salariée était compatible avec ses autres engagements professionnels, a pu en déduire que la mutation géographique constituait un changement des conditions de travail, en sorte qu’en ne se présentant pas sur son nouveau lieu de travail, la salariée avait commis un abandon de poste caractérisant une faute grave ; que le moyen n’est pas fondé ;

Par ces motifs

Rejette le pourvoi

M. Chauvet, Président

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