Recours abusif au CDD d’usage : le Parlement veut faire le ménage

Recours abusif au CDD d’usage : le Parlement veut faire le ménage

Le nombre de CDD d’usage (CDDU) a explosé ces dernières années. Ces contrats, très peu protecteurs pour ceux qui les signent, devaient être réservés à certaines professions : ils se sont répandus un peu partout.

Recours abusif au CDD d'usage : le Parlement veut faire le ménage

Les CDD d’usage (CDDU) ont presque quarante ans. Ils ont été créés en 1982. Au départ surtout pour les “extras” de la restauration et de l’hôtellerie. Ils devaient concerner une vingtaine de professions. Ils se sont répandus dans 200 métiers.

Plus de 9,2 millions de CDDU ont été signés en 2019. Ils n’étaient que 3,7 millions en 2014. Ça représente 16% de l’ensemble des embauches. Dans un peu moins de la moitié des cas, ils ne durent qu’une seule journée. Ces contrats courts sont une spécificité française. On y a recours six fois plus qu’au Danemark et dix fois plus qu’en Allemagne.

 

Le CDD d’usage en résumé

Le CDD d’usage (CDDU) est la forme de CDD la plus souple possible. Pensé pour les secteurs d’activité où il est « d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée » comme le précise la loi, il s’adressait principalement à celui de l’hôtellerie-restauration où l’activité est fluctuante.

Au fil des années, d’autres secteurs ont identifié l’opportunité et ont conclu des accords collectifs permettant d’autoriser le CDD d’usage, comme ceux du déménagement ou des services à la personnes. Depuis sa création en 1982, le CDDU s’est rapidement développé jusqu’à représenter aujourd’hui une embauche sur cinq en France.

La force du CDD d’usage repose sur sa simplicité d’utilisation et diffère du CDD « classique » par le fait qu’il n’intègre pas de délai de carence ou de limitation. En résumé, le CDDU est un CDD, mais sans les contraintes du CDD pour l’établissement. Un même employé peut donc être employé plusieurs fois de suite à un même poste, sans nombre maximum de renouvellement.

Mais si ce contrat est simple à nouer, il est tout aussi simple à rompre. Raison pour laquelle les syndicats voient ce contrat d’un mauvais oeil et le considèrent comme une « forme extrême » de précarité puisqu’en plus de n’assurer aucune sécurité au salarié, elle ne donne même pas droit à la prime de précarité de 10% qui existe pour les CDD classiques.

 

Des contrats peu protecteurs pour le salarié

On peut les enchaîner sans limite de renouvellement, contrairement aux CDD classiques. Il n’y a pas de prime de précarité à la fin, sauf dans certaines branches professionnelles qui ont prévu un accord spécifique. Il n’y a pas non plus de délai de carence et on peut donc les enchaîner sans pause. C’est devenu un mode de vie pour des millions de salariés dont l’employeur peut décider du jour au lendemain de se passer de leurs services. À l’origine, les CDDU étaient réservés aux secteurs qui ne peuvent pas recourir aux CDI, comme par exemple les foires et salons.

Selon le rapport remis à Élisabeth Borne par un député et un sénateur LREM, les arts et spectacles les utilisent très largement, avec les hôtels-cafés-restaurants, les instituts de sondage, les entreprises de service à la personne, les établissements privés d’enseignement, et, donc, les foires et salons.

Un rapport parlementaire prône une régulation, la ministre botte en touche

Le rapport ne prône pas la disparition de ce système. Mais sa vingtaine de propositions veut les réguler et son objectif est de d’en réduire le nombre de 20% en trois ans. L’une des ses propositions, c’est de donner force de loi à toutes les décisions de justice qui conduisent à ce que l’on appelle la requalification de ces contrats. Les tribunaux décident en effet très souvent que les salariés employés habituellement en CDD d’usage voient leur contrat requalifié en CDI. Le rapport propose que ce mouvement soit inscrit dans la loi. Le député et le sénateur veulent aussi que tous les salariés en CDDU puissent bénéficier d’une indemnité de précarité.

La réponse de la ministre du Travail a été assez floue. Elle veut s’en remettre à la négociation avec les partenaires sociaux, et notamment dans les branches, pour avancer sur ce sujet.

 

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