Abandonner son poste, c’est désormais renoncer au chômage

La loi du 21 décembre 2022 portant sur les mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi a été votée en cette fin d’année, et pas pour le bonheur de tous. À 210 voix contre 140, l’Assemblée nationale a voté notamment pour l’exclusion des droits au chômage de l’auteur d’un abandon de poste. Le Conseil constitutionnel à son tour a reconnu la conformité de ce texte à la Constitution. Vous l’avez compris, pas moyen d’y échapper.

Mais que change cette loi dans la réglementation relative aux droits au chômage ? Un abandon de poste exclue-t-il nécessairement le bénéfice des travailleurs ? Quelles sont les conséquences pour l’employeur ? Et pour le salarié ? Explications.

État des lieux avant la loi : pas de définition de l’abandon de poste 

Abandon de poste et chômage ne font plus bon ménage. Pour comprendre l’apport de la loi, encore faut-il comprendre l’état du droit antérieur. Un salarié est considéré avoir abandonné son postedès lors qu’il ne se rend plus à son travail sans justification, et sans autorisation, et ne revient pas malgré une mise en demeure de son employeur.  

L’abandon de poste avait souvent pour conséquence un licenciement pour faute, simple ou grave, et toujours une rupture contractuelle. Le salarié pouvait, suite à cette procédure, toucher des allocations chômage.  

Une nouvelle présomption de démission  

Désormais, “le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail est présumé avoir démissionné”. Ce sont les termes qui ressortent de cette réforme. Du côté employeurs, ils disposent d’un nouveau dispositif de pression, en plus du licenciement pour faute grave.  

Les abandons de poste ont poussé les parlementaires et le gouvernement à prendre des mesures radicales, d’autant plus qu’aucune définition n’est livrée par le Code du travail. Et quoi de mieux que la privation de l’assurance chômage pour ralentir cet effet de mode.  

Désormais, l’auteur d’un abandon de poste est présumé avoir démissionné, ce qui remet en cause de façon certaine le principe selon lequel une démission ne se présume pas.  

Mais force est de constater qu’aucune statistique sur le sujet n’a justifié de telles mesures.  

Qui peut être renversée par le salarié  

Le salarié qui a vu son abandon de poste requalifié en démission peut toujours contester cette présomption devant le conseil des prud’hommes. Il s’agit en effet d’une présomption simple. Les employeurs risquent donc un contentieux important s’ils utilisent ce dispositif de manière abusive, c’est pourquoi ils doivent rester vigilants. 

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ? Si le salarié perd, le contrat de travail est réputé rompu du fait d’une démission, et le salarié ne percevra pas d’indemnité chômage.  

Mais s’il gagne, l’employeur est réputé avoir rompu le contrat de travail sans cause réelle et sérieuse, ce qui ouvre droit à de nombreuses indemnités, et surtout aux droits à l’assurance chômage. L’enjeu de l’entreprise à présent et d’être certaine qu’il s’agit effectivement d’un abandon de poste, pour éviter de voir requalifiée la procédure en licenciement sans cause réelle et sérieuse.  

En théorie… 

Le salarié qui a abandonné son poste et qui est présumé démissionnaire peut en théorie saisir le conseil des prud’hommes. En pratique, cela risque de prendre des mois pour qu’il soit jugé. Il pourra toutefois, après l’écoulement d’un délai de 121 jours, et s’il justifie de recherches d’emplois suffisantes, passer devant une commission paritaire de Pôle Emploi pour faire une demande d’allocation chômage.

(Crédit photo : iStock)

Source Les Échos

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