Portrait d'Alexandre Polmard, éleveur-boucher

"Je veux casser les codes", affirme celui qui ouvrira en juillet sa troisième boucherie, en plein centre de Rome, et rêve de s'installer à New York.

Les gourmets parisiens s’arrachent ses côtes de boeuf six mois à l’avance. A 25 ans seulement, le boucher et éleveur lorrain Alexandre Polmard a misé sur internet et les boutiques de luxe pour conquérir Paris et Rome, tout en séduisant les chefs étoilés.

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Alexandre Polmard, éleveur-boucher: la technologie au service de l’excellence

“Tout reste à faire” dans cet univers d’excellence, assure le jeune homme issu de six générations de bouchers, qui entend bien demeurer dans la campagne meusienne où il est né et élève ses génisses.

A Saint-Mihiel, gros bourg situé entre Commercy (et ses madeleines) et Verdun (et ses dragées), sa famille d’éleveurs-bouchers s’est taillée une belle réputation depuis 1847.

C’est à New York, où il passait une année sabbatique avec le projet d’intégrer une école de commerce, que le jeune homme a décidé de reprendre l’affaire familiale, un jour de blues.

“J’étais sur la 5e avenue, il neigeait. Ce qui me manquait, c’était la ferme”, raconte l’éleveur au physique de rugbyman, en concédant dans un sourire que “sur le papier, être boucher à Saint-Mihiel, c’est pas trop sexy”.
Dans les années 1970, son père, François, qui “ne parlait que boucherie, même en vacances”, avait lancé recherches et expérimentations sur la viande, avec l’aide d’ingénieurs agronomes, “pour apporter de la technologie au monde artisanal, sans pour autant que ce soit de l’industriel”.

Aujourd’hui, insiste le fils, Alexandre, “l’objectif, c’est de redonner à une viande une identité”, et que les connaisseurs puissent “reconnaître à l’aveugle une viande, son origine ou son boucher”, comme ils le font avec un vin.

Portrait d'Alexandre Polmard, éleveur-boucher

 

– Hibernation –

Ses clients prestigieux lui donnent raison: Clément Leroy, chef de cuisine du Guy Savoy (trois étoiles Michelin à Paris), salue l’affinage de sa viande, qu’il dit reconnaître immédiatement à sa “signature”.

“Alexandre est un bel ambassadeur de sa famille. Il est entier, a un parler-vrai, je me retrouve un peu dans sa jeunesse”, poursuit le chef, qui a mis à sa carte un paleron de boeuf Polmard en deux cuissons accompagné de wasabi.

La qualité doit peu au hasard: les bêtes – des blondes d’Aquitaine – font l’objet d’une sélection génétique et génomique, et reçoivent une alimentation équilibrée en fonction de leur âge et de leur morphologie.

Quant à la maturation, “elle ne se fait pas sur carcasse mais pièce à pièce, et au jour près”: 50 jours pour une côte de boeuf, à peine 30 pour un steak haché, détaille le boucher, regard bleu-gris et tutoiement facile.

Le plus spectaculaire’ Un procédé unique de congélation, appelé “hibernation”, mis au point il y a près de vingt ans à Saint-Mihiel. Deux minutes à -120°C avec ventilation à 120 km/h, après une mise sous vide des morceaux, avec contrôle du taux d’humidité et d’oxygène.

L’innovation, qui s’est imposée comme un gage de qualité, s’exporte depuis septembre à Paris, dans une boutique ultra-chic de la rive gauche. Célébrités et gourmets se repassent l’adresse: passage… de la Petite-Boucherie.

– Ecrans géants –
S’il affirme avoir simplement “repris le savoir-faire de (son) père”, le dernier rejeton des bouchers Polmard entend moderniser et développer l’activité. Son site internet, où le steak peut atteindre 80 euros le kilo, génère ainsi près de la moitié de son chiffre d’affaires.

“Je veux casser les codes”, affirme celui qui ouvrira en juillet sa troisième boucherie, en plein centre de Rome, et rêve de s’installer à New York.

Pourtant, Alexandre Polmard ne jure que par “sa Meuse”, où il entend au moins doubler son cheptel dans les prochaines années pour faire face à la demande.

Ses génisses, minutieusement sélectionnées dans des élevages du Sud-Ouest, rejoignent la Lorraine à l’âge de 6 à 9 mois, puis gambadent dans 120 hectares de forêt, été comme hiver.

C’est là qu’il veut construire sa maison avec sa compagne, ainsi qu’un abattoir, “pour réduire à 20 minutes le temps de transport, et donc le stress des bêtes”.

Et, bientôt, les images de sa ferme seront diffusées en direct, sur écrans géants, dans ses boutiques à Paris et à Rome. “Il faut que les gens voient que la boucherie, c’est avant tout ça”, affirme-t-il, un cigare à la main.

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