Pourquoi les petits-déj’ d’hôtel sont si chers ?

Pourquoi les petits-déj’ d’hôtel sont si chers ?

Du pain, du beurre, de la confiture, du café, un jus d’orange, éventuellement des céréales, voici ce que vous consommez pour le petit-déjeuner. Pas de quoi se ruiner… sauf si vous le prenez à l’hôtel. La facture peut vite alléger votre portefeuille : 8, 9, 15 voire 20 ou 40 € (par personne) selon le type d’établissement !

Certes, vous avez souvent bien plus dans le bol et l’assiette que dans votre cuisine… mais est-ce normal de payer quasiment le prix d’un repas du midi dans une brasserie dès potron-minet ?

Une partie de la réponse se trouve dans une étude qui va être dévoilée par Coach Omnium, une société d’études et de conseil spécialisée dans le tourisme et l’hôtellerie. « Le taux de captage des clients des petits-déjeuners varie de 60 à 80 % selon la catégorie d’hôtel, explicite Mark Watkins, président de la société parisienne. Dans les foyers, 90 % des clients prennent leur petit-déjeuner. Il y a donc une distorsion. »

Pourquoi les petits-déj’ d’hôtel sont si chers ?
Plus de 70 % des sondés trouvent que les petits-déjeuners sont vendus à un tarif trop élevé. (Photo : Pexels)

Et pour ceux qui en douteraient encore, le prix a son importance : « Plus de 70 % des sondés trouvent que les petits-déjeuners sont vendus à un tarif trop élevé. Soit par rapport à ce qu’il y est servi ou à la qualité de l’offre, soit par rapport à leur budget, soit encore parce qu’ils consomment peu. »

 

Les professionnels défendent leurs prix

Mais qu’est-ce qui justifie ces tarifs ? Les professionnels de l’hôtellerie se défendent en insistant sur le coût du premier repas de la journée. « Un petit-déjeuner buffet, ça prend du temps, estime Laurent Duc, président de l’Union des métiers des Industries de l’Hôtellerie (UMIH), qui tient l’hôtel Ariana à Lyon. On se doit d’y offrir de la variété. Et si on propose des œufs brouillés, ça a un prix, donc c’est un coût moyen. »

Bref, comprenez qu’il est impossible de dissocier les petits des gros mangeurs (dont ceux qui en profitent pour préparer leurs sandwiches du midi, dénoncent certains hôteliers) et qu’il faut des croissants pour tout le monde au risque d’en mettre à la poubelle à la fin du service… Sans oublier les mètres carrés de la salle dévolue au café et la paie du personnel qui va avec.

Pourquoi les petits-déj’ d’hôtel sont si chers ?
Les professionnels de l’hôtellerie se défendent en insistant sur le coût du premier repas de la journée. (Photo : Pixabay)

Pierre Courtois de Viçose est le PDG du groupe Altica, qui regroupe une dizaine d’établissements dans le sud ouest du pays. Lui a l’impression que son petit-déjeuner à 8,50 € est au juste prix. « Je présente un panel de viennoiseries, du pain blanc, de la salade de fruits frais, des fromages blancs, des yaourts artisanaux, des confitures parfois locales, du jus d’orange pressé toute l’année, de la charcuterie. »

L’hôtelier en convient cependant, certains de ses collègues exagèrent et ce ne sont pas forcément ceux qui font le plus chauffer la carte bleue : « Qu’un hôtel quatre-cinq étoiles fasse payer 25-30 €, ce n’est pas illogique : le client mange des légumes grillés, du saumon frais, des fruits de mer, c’est un véritable service. Mais quand vous avez des deux ou trois étoiles qui présentent des petits-déjeuners entre dix et vingt euros, c’est parfois plus difficile à comprendre pour les clients, j’en conviens. »

 

Pas de marge exceptionnelle

Les petits-déjeuners servent-ils à rattraper la marge des hôteliers sur les chambres, qui sont parfois moins chères avec les tarifs internet ? « Honnêtement, ce n’est pas le secteur où je fais le plus de marge », répond Pierre Courtois de Viçose. « Ne croyez pas que l’on s’enrichit avec les petits-déjeuners », ajoute Laurent Duc à l’UMIH qui voit dans cet échange une question psychologique.

Pourquoi les petits-déj’ d’hôtel sont si chers ?
« Ne croyez pas que l’on s’enrichit avec les petits-déjeuners », ajoute Laurent Duc, président de l’Union des métiers des Industries de l’Hôtellerie. (Photo : Campus France / Flickr)

Le petit-déjeuner a toujours représenté peu ou prou 10 à 15 % du prix de la chambre d’hôtel, sauf qu’aujourd’hui, avec la pratique du yeld management (qui module le prix des chambres selon les périodes) un client dormant dans une chambre payée 60 € au lieu de 120 € trouvera son petit-déjeuner à 12 € bien trop cher. Ce qu’il n’aurait pas ressenti s’il avait payé sa chambre…….. 120 €.

 

Un malentendu sur le petit-déjeuner ?

Ce débat n’est en tout cas pas nouveau. Mark Watkins en parlait déjà en 1992 dans une première étude. Et son avis n’a pas évolué sur la question : « Le petit-déjeuner reste la seule prestation encore festive pour des clients blasés de tout. Les hôteliers considèrent le petit-déjeuner comme une contrainte et les clients attendent des produits locaux, des mets qu’ils ne consomment pas chez eux, dans des salles agréables. Bref, il y a un vrai malentendu sur le sujet. » Et un porte-monnaie qui maigrit à mesure que vous remplissez votre tasse de café.

Ouest France