Les grèves ont déjà fortement fragilisé certains secteurs économiques

Les grèves ont déjà fortement fragilisé certains secteurs économiques

 

Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire estime que la grève ne pèsera pas sur la croissance en cas de compromis rapide. Il ne dispose toutefois pas encore de « chiffres crédibles » sur l’impact du mois de grève des transports sur l’artisanat, le commerce ou l’hôtellerie-restauration. En région parisienne, certains commerces évoquent des chutes d’activité de 30 %, tandis que le secteur hôtellerie-restauration parie sur plus de 700 millions d’euros de perte de chiffre d’affaires sur le mois écoulé.

 

Les restaurateurs parisiens sont particulièrement affectés par la conjugaison des grèves à la SNCF et à la RATP depuis plus d’un mois désormais. Getty Images/Cultura RF

Le bilan économique et social des grèves en cours à la SNCF et à la RATP contre  la fin des régimes spéciaux de retraite reste à faire. Mais un mois après leur déclenchement, leur impact négatif est tangible. Au-delà de la RATP et de la SNCF, qui affichent déjà un manque à gagner supérieur à 800 millions d’euros, les secteurs du tourisme, du commerce, de la culture et de l’habillement sont sévèrement affectés, essentiellement en région parisienne. Dans une interview au « Journal du Dimanche », le ministre de l’Economie Bruno Le Maire maintient que les perspectives économiques de la France sont bonnes et solides avec une croissance qui « atteindra 1,3 % en 2019, tout comme nous le prévoyons pour 2020 ». Et d’ajouter que le conflit sur les retraites ne devrait pas peser sur la croissance, à condition qu’un compromis soit trouvé « rapidement ».

Ce message risque de mal passer auprès des nombreux acteurs économiques, qui se sont débattus ces dernières semaines avec des annulations de réservation. A la SNCF, le seul manque à gagner se rapproche désormais des 700 millions d’euros, tandis que l’onde de choc pourrait perdurer courant 2020 pour son activité fret, en déclin et en perte de longue date. Il reste peu d’espoir que les comptes de l’entreprise ne soient pas dans le rouge, ce qui obère encore davantage les investissements tant attendus sur le réseau.

Inquiétudes pour les petits indépendants

Dans l’hôtellerie-restauration, confrontée un an auparavant aux  incidences du mouvement des « gilets jaunes » , « les difficultés restent heureusement très localisées sur Paris-Ile-de-France », assure Thierry Grégoire, l’un des responsables de l’Umih, sa principale organisation patronale. Un constat que nuance toutefois le GNI, autre groupement patronal. Ce dernier estime à 720-740 millions d’euros la perte globale de chiffre d’affaires pour le secteur au cours des trente premiers jours de grèves, l’addition s’élevant à 420 millions pour les professionnels parisiens, 300 millions pour les restaurateurs. « Je suis très inquiet pour les petits indépendants », déclare son président, Didier Chenet.

Vendredi 3 janvier, le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, et la secrétaire d’Etat, Agnès Pannier-Runacher, ont pris le pouls des professionnels parisiens à l’occasion d’une rencontre avec des artisans, commerçants, restaurateurs et hôteliers de la rue Montorgueil dans le 2e arrondissement. Dans la foulée, ils ont réuni des représentants d’organisations professionnelles de l’artisanat, du commerce, de l’hôtellerie-restauration, et des transports, afin de dresser un point d’étape sur l’impact économique des grèves. A ce stade, Bruno Le Maire estime qu’il n’y a pas encore de « chiffres crédibles », tout en reconnaissant que les secteurs de l’hôtellerie et des commerces à Paris et en Ile-de-France sont les plus touchés.

Selon des témoignages recueillis par « Les Echos », les incidences du conflit social ont même été enregistrées dans l’hôtellerie économique et la restauration rapide, des activités présumées résilientes. Les hôtels de la chaîne B&B situés à proximité des gares TGV en région ont par exemple été touchés, rapporte son directeur général Europe de l’Ouest, Vincent Candalle.

 

Impact aussi pour Burger King

De même, le réseau de « fast-food » Burger King, dont la croissance était jusqu’alors tonitruante, a fait maigre en décembre. « Le mouvement nous coûte environ 6 millions de ventes sur le mois [à base comparable, NDLR], sachant que les ‘gilets jaunes’ nous avaient coûté de 2 à 3 millions sur le mois de décembre 2018 », indique son patron France Jérôme Tafani. A Paris et en petite couronne, la tendance est à « une baisse d’activité de 20 % à 25 % », mais même « les régions qui bénéficient d’habitude d’apport de touristes, domestiques ou étrangers sont en recul », constate le dirigeant. Seule exception, les Alpes, où il semble que la fréquentation se soit maintenue.

Dans ce contexte, le ministère de l’Economie a rappelé avoir réactivé, depuis le 11 décembre, le dispositif mis en place en soutien aux entreprises déstabilisées par le mouvement des « gilets jaunes ». Il s’agit d’une palette de mesures : chômage partiel, étalement de charges fiscales et sociales voire exonération pour les situations extrêmes. « C’est un traitement au cas par cas. Il n’y a pas de mesure générale », souligne-t-on à Bercy. S’agissant du chômage partiel, 189 sociétés, représentant au total 2.819 employés, en ont fait la demande, précise par ailleurs le ministère de l’Economie.

En outre, a rapporté le GNI dans un communiqué, Bruno le Maire s’est engagé à plaider auprès du gouvernement pour une suspension d’urgence de la nouvelle taxe Pénicaud de 10 euros prévue à partir du 1er janvier 2020 sur tous les contrats d’usage – ces contrats à durée déterminée d’usage (CDDU) dont la souplesse rend de grands services à la profession de l’hôtellerie-restauration. Une taxe que ne digère pas le GNI. Pour sa part, la Ville de Paris a décidé d’exonérer les hôteliers du paiement pour le mois de décembre du droit pour usage de terrasse. Le patronat a par ailleurs sollicité le gouvernement pour obtenir une mesure identique pour la taxe de séjour.

Source Les Echos Par Christophe Palierse

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