La SNCF Rame en Cuisine

Rien de tel pour gagner une respectabilité alimentaire voire gastronomique avec le repas des Chefs étoilés

La SNCF Rame en Cuisine

 

La SNCF Rame en CuisineIl est bien loin le temps du wagon-restaurant avec nappes blanches amidonnées. Aujourd’hui, malgré de louables efforts, la restauration en gare et dans les trains reste très médiocre.

La SNCF Rame en Cuisine

En installant son stand au pied de l’escalier majestueux qui conduit au Train bleu, le restaurant de la gare de Lyon, Carinne Teyssandier, animatrice de l’opération « Gares gourmandes », ne pouvait choisir lieu plus emblématique de la malbouffe ferroviaire. Le Train bleu est sans doute la seule table où l’on mange mal, classée aux monuments historiques. Paris regorge de déçus du Train bleu qui ajoutent souvent : « De toute façon ce sera pire dans le train. »

SNCF et casse-croûte n’ont jamais fait bon ménage. Sur les quais comme dans les trains. Heureusement Patrick Ropert, directeur général de SNCF Gares & connexions, est arrivé pour « surprendre » les milliers de visiteurs quotidiens et leur proposer des animations avec des grands chefs, des menus régionaux et des offres gourmandes à prix réduits. Dans 28 gares, du 2 au 18 octobre, plusieurs dizaines de chefs et d’artisans des métiers de bouche ont fait démonstration de leur talent et étalage de leurs produits.
De Lille à Agen, de Poitiers à Dijon, Périgueux, Avignon, Strasbourg et dans les principales gares parisiennes, le passant a goûté, peut-être traîné un peu et une fois les tréteaux pliés s’en est reparti vers sa banlieue ou le wagon-bar de son TGV. Le Train bleu, imperturbable, a continué le service. Si l’on en croit la rumeur, le succès de Lazare, la brasserie d’Eric Fréchon (trois étoiles au Bristol) gare Saint-Lazare susciterait des émules dans la confrérie des macaronés. Thierry Marx à la gare du Nord, Ducasse à Montparnasse, on en parle… Pourquoi pas, tant il paraît lointain le temps où l’on allait au buffet de la gare de Metz pour s’y régaler de la meilleure choucroute de la ville.
Appel aux chefs renommés

De même le wagon-restaurant avec nappes, serviettes amidonnées et maître d’hôtel a vécu ses derniers jours avec le Trans-Europ-Express (TEE) disparu dans les années 1980 au profit du TGV et des Intercités. Fini le cuistot au corps à corps avec l’entrecôte dans un réduit enfumé. La flamme est désormais interdite dans les wagons mais le café ou le thé sont toujours brûlants parce qu’ils doivent « être faits à l’eau minérale », faute d’eau courante à bord selon une confidence de barman TGV. Les sandwichs, eux, restent glacés.

Lors d’un récent voyage à Lausanne à bord du Lyria, j’ai bénéficié du déjeuner compris dans le billet première classe. « Poulet, saumon ou végétarien ? » m’a interrogé d’une voix ferme le conducteur du chariot dans l’allée. Prudent, j’ai choisi le végétarien : salade de pommes de terre, maïs, un quartier de tomate ; salade de petites pâtes, courgette, cube de fromage, deux brins de laitue, une feuille de vigne affaissée ; rondelle de fromage de chèvre et gâteau genre moelleux chocolat mais avec du caramel coulant à l’intérieur. Vaisselle en dur et couverts métal. Vin rouge, rosé, blanc, soda, eau minérale servis au verre. « Vous en voulez deux ? », demande gentiment le personnel qui passe une seconde fois pour le café, normalement médiocre. Un plateau identique à celui d’une classe éco lambda en avion : bas de gamme comestible.
Et pourtant elle se décarcasse la SNCF sur ce créneau qui représente 17 millions de consommations annuelles et sur lequel elle a toujours perdu de l’argent. Après une collaboration peu concluante avec la Société Cremonini, la restauration à bord des TGV et des Intercités a été confiée en 2013 à la coentreprise Newrest/Elior avec un contrat de trois ans plus deux renouvelables. Pour relever ce défi, les impétrants ont repris une formule éprouvée : l’appel aux marques connues et aux chefs renommés.

Des progrès dans le casse-croûte
Au bar, viennoiseries Paul, sandwiches, salades ou fruits frais Monop’Daily, café Illy, chocolat chaud Angelina, gourmandises de Michel & Augustin, etc. Rien de tel pour gagner une respectabilité alimentaire voire gastronomique avec le repas des Chefs étoilés (17 €) servi à la place en première classe. Ils sont passés par la maison « boco » des frères Ferniot qui mettent en bocaux des plats conçus pour être réchauffés sur des recettes de trois étoiles : Anne-Sophie Pic (œuf moelleux, lentilles fondantes et oignons rouges), Jean-Michel Lorain (épaule d’agneau au colombo aubergines et figues) ou Philippe Conticini (pana cotta vanille et pralin) qui tournent à la carte de boco/TGV avec leurs collègues Gilles Goujon, Emmanuel Renaut, Régis Marcon ou Christophe Michalak.

En usager assidu de la SNCF depuis des décennies, reconnaissons avec fair-play que le casse-croûte s’est amélioré. Le sandwich club jambon-emmental à 5,40 €, le croque-monsieur à 6,40 euros, le yaourt bio à 3,20 euros, le plat cuisiné du chef boco à 9,90 euros, la Vittel (33 cl) à 2 euros et l’espresso à 2,50 euros, la nourriture a de la tenue et les tarifs restent raisonnables, dans la moyenne haute. On reprochera cependant le manque de choix au fil du voyage. Ravitaillé à flux tendu à bord de TGV, on préfère le manque aux invendus ; alors pour goûter aux « bocos » mieux vaut se précipiter à la voiture-bar dès le départ du train.

JP Géné Le Monde

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