Rupture conventionnelle : ne faites pas n'importe quoi !

Rémy Taillefer, aujourd'hui consultant indépendant en stratégie digitale, revient sur les 10 causes de l'échec de l'entreprise qu'il a créée.

Rupture conventionnelle : ne faites pas n’importe quoi !

Ce mode de rupture du contrat de travail à l’amiable connaît un franc succès, mais il n’est pas sans risque pour l’employeur qui se montrerait peu soucieux de la procédure, ou de la façon d’obtenir le consentement du salarié. Ce qu’il faut savoir.

Rupture conventionnelle: ne faites pas n'importe quoi!
Erreurs de castings, problèmes de délégation et de rémunération…, Rémy Taillefer, aujourd’hui consultant indépendant en stratégie digitale, revient sur les 10 causes de l’échec de l’entreprise qu’il a créée.
Vice du consentement ou non-respect de la procédure : voici les deux motifs qui conduisent les juges à invalider les ruptures conventionnelles.

1,72 millions de ruptures conventionnelles ont été homologuées depuis 2008, année d’entrée en vigueur du dispositif. Alors que la peur des prud’hommes fait trembler nombre d’employeurs, prennent-ils moins de risques à se séparer d’un collaborateur par “consentement mutuel”, plutôt qu’en procédant à un licenciement ? “Globalement, on peut dire que les juges ont tendance à sécuriser les ruptures conventionnelles, estime Cyprien Pialoux, associé au sein du cabinet en droit social Flichy Grangé. La jurisprudence a par exemple jugé récemment qu’il était possible de signer une rupture conventionnelle, y compris après la notification d’un licenciement. Un tel accord vaut renonciation au licenciement. Des ruptures conventionnelles ont par ailleurs régulièrement été validées alors que le salarié était arrêté à la suite d’un accident du travail, ou que les relations avec l’employeur étaient notoirement conflictuelles. Il faut un vice du consentement ou un non-respect de la procédure, pour qu’il y ait remise en cause.”

Voici, selon Cyprien Pialoux, les principaux pièges à éviter :

1. Forcer l’accord du salarié
Sans surprise, les juges sanctionnent l’employeur lorsque le salarié prouve que son consentement a été vicié. C’est le cas lorsqu’on s’est montré un peu trop insistant avec lui afin d’obtenir son accord… Attention aussi à ne pas lui donner de fausses informations. Une rupture conventionnelle a, par exemple, été annulée car l’employeur avait indiqué au salarié qu’il recevrait un montant précis d’allocations chômage. Finalement, les droits du salarié se sont révélés moindres. Il a été considéré que cette erreur avait été déterminante dans le consentement du salarié, alors même que l’employeur n’avait aucune obligation d’informer le salarié sur le montant de l’allocation auquel il pouvait prétendre. Un conseil : informer le salarié qu’il peut prendre contact avec Pôle Emploi est suffisant, inutile de se lancer dans des calculs précis.

2. “Antidater” la rupture
Le délai de rétractation de quinze jours calendaires à compter de la signature constitue une période d’incertitude, dont l’employeur se passerait volontiers. La tentation existe d’antidater la rupture à “moins quinze jours”. Une pratique totalement illégale.

Rappelons au passage que la signature de la rupture doit être précédée d’un entretien au cours duquel le principe de la rupture et le montant de l’indemnité sont discutés. La signature, qui concrétise l’éventuel accord entre l’employeur et le salarié, peut avoir lieu le jour de cet entretien, dans la foulée.

3. Prévoir une indemnité trop faible

Le montant de l’indemnité de rupture doit être au moins égal à celui de l’indemnité conventionnelle de licenciement (sauf dans certains secteurs d’activité comme l’édition, où la référence est l’indemnité légale de licenciement). Si le minimum conventionnel n’est pas respecté, le Conseil de prud’hommes peut condamner l’employeur à verser le complément d’indemnité dû.

4. Lever la clause de non-concurrence trop tard
Le contrat de travail peut prévoir la possibilité pour l’employeur de lever la clause de non-concurrence lors de la rupture du contrat de travail. Le salarié est alors dispensé de respecter cette clause. Mais encore faut-il respecter le délai déterminé par le contrat pour informer le salarié de la levée de la clause de non-concurrence. A défaut, la contrepartie financière est due au salarié. En cas de rupture conventionnelle, la jurisprudence a précisé que le délai pour lever la clause de non-concurrence court à compter de la date de la rupture fixée par les parties dans l’accord, cette date ne pouvant être antérieure au lendemain du jour de l’homologation par l’administration (la Direccte).

5. Ne pas faire attention au délai de prescription
Une rupture conventionnelle, signée alors que l’employeur envisageait une procédure disciplinaire, ne vaut pas renonciation à l’exercice de ce pouvoir disciplinaire. Mais attention à ne perdre de vue la question du délai de prescription. A titre d’exemple, l’employeur convoque le salarié à un entretien préalable de licenciement pour faute. Finalement, les parties décident de conclure une rupture conventionnelle. Si le salarié se rétracte ensuite dans le délai de 15 jours, l’entreprise peut le convoquer à un nouvel entretien préalable avant de procéder à son licenciement pour faute. Mais si et seulement si le délai de prescription de deux mois (à compter du jour où il a eu connaissance des faits fautifs) n’est pas dépassé.

Marianne Rey

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