Quand la gastronomie rencontre la science

La cuisine moléculaire est la rencontre entre l’art culinaire et la science. Les chefs jouent sur les mélanges et les textures des aliments connus pour créer de nouvelles saveurs et de nouveaux plats.

Quand la gastronomie rencontre la science

 

Séance de travail entre Pierre Gagnaire, célèbre chef étoilé, et Hervé This, physico-chimiste. Une rencontre à la découvert des secrets de la gastronomie moléculaire.

Quand la gastronomie rencontre la science

Ce domaine culinaire est né de la rencontre dans les années 80 de deux scientifiques passionnés par la cuisine. Nicholas Kurtis, physicien et Hervé This, physico-chimiste, qui ont mis en place le concept de « gastronomie moléculaire » par des théories et des mémoires. Ils ont tenté de comprendre les mécanismes culinaires des aliments pour créer de nouveaux plats.

 

Hervé This, Thierry Marx ou Ferran Adria sont les représentants de la cuisine moléculaire en France et à l’international depuis plusieurs années. A (re-)découvrir !

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Olives liquides inspirées par Ferran Adria, au Bazaar bar de Beverly Hills, en Californie. M. Anzuoni/REUTERS

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Connu du grand public grâce à l’émission Top Chef, sur M6, et comme le “chef moléculaire”, car il étudie avec des scientifiques les transformations liées à la gastronomie, Thierry Marx un parcours atypique. Il a grandi dans une cité HLM du quartier de Ménilmontant, à Paris. Passé par les Compagnons du devoir et diplôme de pâtissier en poche, il lâche tout pour s’engager dans l’armée. Parachutiste puis casque bleu, il revient ensuite en France et multiplie les petits boulots. Engagé comme commis par Claude Deligne, il se passionne pour la cuisine. Adepte du geste précis, Thierry Marx gravit les échelons et détient 2 étoiles Michelin pour son Sur Mesure, au Mandarin oriental.

Vous reprendrez bien une petite molécule?
Avec Thierry Marx, la cuisine sort de son carcan: aux antipodes de Paul Bocuse par exemple, le chef hypermédiatisé jury de “Top Chef” est l’un des papes de la gastronomie moléculaire. Digne héritier du précurseur Hervé This, le chef parisien est aussi une personnalité atypique et engagée: centre de formation gratuit, interventions en milieu carcéral, happenings… Thierry Marx fait souvent le buzz, pour notre plus grand plaisir.

Quand la gastronomie rencontre la science

La gastronomie moléculaire, késako ?

Gastronomie moléculaire, un terme largement utilisé aujourd’hui, sans que l’on sache finalement très bien ce qu’il signifie. Inventé en 1988 par Hervé This, physico-chimiste à l’Inra, et Nicholas Kurti, un confrère britannique, les premières expériences sur le sujet remontent au début des années 80. Discipline plutôt récente donc, mais qui a depuis fait son bout de chemin et qui intéresse aujourd’hui beaucoup de chefs. La gastronomie moléculaire, qu’est-ce que c’est finalement, n’a t-on pas tendance à confondre gastronomie moléculaire et cuisine à l’azote liquide ? La gastronomie moléculaire consiste à comprendre d’une façon scientifique les techniques traditionnellement utilisées par les cuisiniers. Il s’agit de comprendre les procédés chimiques, les processus utilisés en cuisine. Où est alors l’utilité en cuisine ? Hervé This répond que la gastronomie moléculaire “ne doit servir à rien en cuisine”. Le but premier de cette discipline est de comprendre, même si éventuellement, les procédés découverts peuvent trouver des applications en cuisine. Les cuisiniers n’attendront pas la technologie pour s’approprier certaines découvertes de la gastronomie moléculaire. En ça, elle a le mérite d’ouvrir la réflexion sur les pratiques culinaires de ces derniers.

“Le but de la gastronomie moléculaire est de comprendre”
La passion pour l’art culinaire a conduit ces deux hommes à se rencontrer : Hervé This et Pierre Gagnaire, chef triplement étoilé. Ils élaborent ensemble en 2000 un menu “Science et cuisine” pour l’Académie des sciences. De là naîtra leur amitié et leur collaboration régulière. Même s’ils ne se rencontrent qu’irrégulièrement, ils communiquent souvent et produisent chaque mois une recette pour le site Internet de Pierre Gagnaire. Une recette souvent simple, mais conçue avec l’œil d’un scientifique. Leur collaboration se fait sur labase d’une idée théorique qui va déboucher sur une idée culinaire avant d’être exploitée et travaillée en recette. Le but est que la collaboration débouche sur des créations ayant un réel sens culinaire.

Quand la gastronomie rencontre la science

Salade de l’Abbé Nollet © L’Internaute Magazine / J. Gerbet

Lors d’une séance à laquelle a assisté l’Internaute Magazine, ils ont présenté quelques-unes de leurs créations, l’œuf brouillé parfait, qui nécessite une cuisson de 61°C ; le millefeuille Fournier, un millefeuille artificiel monté au bœuf et au foie gras et la salade de l’Abbé Nollet. Ce plat est né d’une idée, “les végétaux ont des feuilles, alors pourquoi ne pas faire des feuilles ?”, d’où l’envie est venue de recréer une salade avec des feuilles artificielles. Des feuilles de champignons, de betteraves rouges, de poivrons rouges et de vinaigrette. “A quoi bon de tels exercices, quand les feuilles de types variés existent déjà ?” s’interroge Hervé This avant de répondre “Les cuisiniers ne sont-ils pas à la recherche de nouveaux goûts, de nouvelles textures ? La possibilité d’obtenir des feuilles d’un type nouveau ne doit pas faire craindre que la nature soit supplantée, mais au contraire faire espérer qu’elle soit enrichie des inventions humaines.” Cette rencontre, une belle histoire entre deux génies, montre que la gastronomie moléculaire apporte son lot de créativité et de stimulation à ces deux passionnés.

 

 

 

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