Le mouchard qui fait trembler les commerçants

Quoi qu'il en soit ce qui n'est pas tapé sur la caisse, n'est toujours pas déclaré.......

Le mouchard qui fait trembler les commerçants

 

Le nouveau logiciel anti-fraude, qui doit équiper les caisses, passe mal. Ca grogne aussi dans ce secteur.

Le mouchard qui fait trembler les commerçants

À partir de janvier 2018, toutes les caisses devront intégrer une espèce de boîte noire anti-fraude. Que les commerçants peuvent déjà installer. Ce qu’ils refusent pour la plupart.Photo ange esposito

L’information était passée un peu inaperçue ( pour certains) en fin d’année dernière. Un logiciel anti-fraude chez les 500 000 commerçants du pays. Une espèce de mouchard qui s’invite dans toutes les caisses, notamment celles des restaurants, au plus tard en janvier 2018.

Une révolution ! Qui fait trembler de peur et de colère les commerçants. Un peu plus de six mois après l’annonce du gouvernement, ils ne sont pas nombreux à avoir digéré la mesure. Mais de quoi s’agit-il exactement ? D’un logiciel qui enregistre absolument toutes les opérations effectuées en caisses pour éviter que quelques factures ou additions ne s’égarent. Et ne viennent nourrir la fraude à la TVA.

“En fait, il s’agit d’une mise à jour, explique Karim Zouaoui, directeur commercial Paca de JDC, une société spécialisée. Les caisses vendues sont mises aux normes. Et il y a ainsi une traçabilité sur tout ce qui est fait sur une caisse enregistreuse.”

Près de 3 milliards d’euros, sur 400 milliards que représente la vente commerciale, manqueraient dans les caisses de l’État. De l’argent qui disparaît de différentes manières, grâce notamment à un autre logiciel, frauduleux celui-là, qui permet d’effacer des opérations en caisse. Et qui vaut une amende de 300 000€. Mais verbaliser ne suffit pas. Alors, on a élaboré un logiciel anti-fraude. Infaillible.

Et qui a un coût. Autour de 1 500 €. “Mais ça peut monter jusqu’à 7 000 €, assure Frédéric Jeanjean, membre de l’UMIH 13, l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie. On peut le louer aussi. Mais d’une manière ou d’une autre, il faut payer.” Et c’est évidemment ça qui exaspère. Devoir mettre la main à la poche. Et vivre en permanence avec une espèce de boîte noire dans sa caisse.

“Je vois régulièrement des gens qui veulent ouvrir un commerce, s’emporte Jean-Luc Gosse, président d’une fédération de commerçants (voir plus bas). Quand ils constatent les contraintes, la moitié renonce. Et aujourd’hui, on vient en plus leur imposer un logiciel anti-fraude.” Ce à quoi Karim Zouaoui répond : “Mais c’est un gage de sécurité pour le commerçant. C’est un bon outil de travail contre les employés tentés de piquer dans la caisse. Il permet donc de mieux gérer son commerce. Tout le monde va se procurer les nouvelles caisses. On en vend de plus en plus. Notre chiffre d’affaires a d’ailleurs augmenté de 8 %.”

Côté commerçants, on parle pourtant d’un front du refus. “De toute façon, assure un restaurateur, celui qui veut frauder continuera à frauder. Il y a plein de manières de le faire.”

Les commerçants en activité trouveront peut-être la parade. Mais pour ceux qui s’installent, ça va être plus compliqué. Car les caisses anti-fraude sont déjà en vente, même si elles ne sont pas encore obligatoires.

Et on ne trouverait plus que ça sur le marché. “Les nouvelles caisses sont toutes aux normes, assure Alain Paulin, président de l’UMIH des BdR. Tout le monde va devoir s’y mettre, d’autant que les comptables seront là pour rappeler cette obligation.”

Le destin semble tracé. À moins que… Début 2015 en Belgique, l’État contraignait les hôtels, cafés et restaurants à installer eux aussi une caisse enregistreuse. Tollé général dans la corporation, exaspérée par le climat de suspicion qu’elle sentait naître autour d’elle. En fin d’année, l’État revoyait sa copie, bousculé par… le conseil d’État. Les petits restaurateurs étaient alors épargnés par le mouchard. L’histoire se réécrira-t-elle en France ?

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