Vie de RH : « Le jour où j’ai fait une grosse erreur de casting lors du recrutement d’un DG »

Bien qu’elle fût déjà DRH expérimentée, Sophie Athlan-Gazet s’est fait berner par un candidat mythomane, recruté à un poste de directeur général. Elle raconte.

"Quand on recrute beaucoup, on a parfois envie d’embaucher tout de suite une personne qui nous plaît."
“Quand on recrute beaucoup, on a parfois envie d’embaucher tout de suite une personne qui nous plaît.” © HelloWork

« En matière de recrutement, j’ai la chance d’avoir un bon feeling »

« À l’époque, forte de plus de dix ans d’expérience RH, je dois recruter un directeur général. C’est une création de poste. Je suis confiante car je suis accompagnée par un cabinet de recrutement, qui chasse des candidats pour moi, et que j’ai plutôt la chance d’avoir un bon feeling. Je me trompe rarement. J’arrive à sentir si un candidat va pouvoir s’épanouir dans notre entreprise. »

« Le cabinet m’envoie un profil qui coche toutes les cases : connaissance du monde des start up, expérience à l’international… Je le rencontre, puis c’est au tour du président et de deux membres du conseil d’administration de se prononcer. Le candidat leur plaît. Il paraît un peu hésitant, par peur de l’avenir, mais on fait tout pour l’attirer, car on le veut à tout prix ! Rémunération, intéressement… On se plie à toutes ses exigences. Quelques mois après l’ouverture du poste, il intègre notre société. »

« Il multiplie les absences avec des excuses farfelues »

« Au bout de quelques mois, je commence à avoir des doutes : il a un comportement étrange, il me demande de ne pas lui verser son salaire, il multiplie les absences avec des excuses farfelues. Un jour, sa femme est gravement malade, un autre son fils a eu un accident de moto. Le président lui accorde le bénéfice du doute. Sa période d’essai est validée. Mais le boulot n’est pas fait et on est de plus en plus perplexes. On décide de se séparer de lui parce que les objectifs ne sont pas tenus. »

« On réfléchit à la manière dont on va mettre un terme au contrat quand, un beau jour, je reçois l’appel d’une DRH travaillant pour une filiale d’un grand groupe français. Elle me demande si je connais ce monsieur, qui se présente comme directeur général de ma société, dans une vidéo tournée lors d’un salon aux États-Unis. Je lui confirme qu’il travaille bien chez nous. Elle m’apprend qu’il est également employé chez eux depuis quelques mois et que cela fait deux mois qu’elle n’arrive plus à le joindre parce qu’il est prétendument parti en Amérique du Sud ! À elle, il avait expliqué que sa famille vivait là-bas, qu’elle avait été décimée et qu’il devait gérer des formalités administratives à la suite de leur décès. »

« On avait affaire à un mythomane professionnel ! »

« Je suis tombée des nues : à aucun moment je n’avais imaginé ça ! Ce monsieur n’en était certainement pas à son coup d’essai, on avait affaire à un mythomane professionnel ! Ce recrutement s’est soldé par une rupture conventionnelle et on a embauché un successeur avec lequel j’avais déjà travaillé, dont j’étais sûre. Après cet échec, je me suis remise en question. Il m’a permis de me rendre compte que ce n’est pas parce qu’on a un coup de cœur pour un candidat qu’il ne faut pas rester vigilant, qu’il ne faut pas creuser, notamment lorsqu’on recrute sur des postes à responsabilités. »

« J’avais demandé des références au cabinet de recrutement mais le candidat avait réussi à éluder la question en donnant des numéros bidon. Maintenant, je ne transige plus avec ça : je demande systématiquement des références, au moins d’anciens collègues avec lesquels je peux échanger. »

« Ne vous emballez pas trop vite ! »

« J’ai aussi regretté d’avoir fait le forcing alors que le candidat avait de gros doutes sur le poste. Désormais, quand je vois que la personne hésite, j’alerte le manager. Je lui dis de se tourner plutôt vers un candidat qui adhère dès le début au projet, qui sera facile à embarquer. »

« Il faut rester objectif. Quand on recrute beaucoup, on a parfois envie d’embaucher tout de suite une personne qui nous plaît. Mieux vaut prendre du recul, laisser passer la nuit, débriefer le lendemain avec le manager et se dire qu’un cabinet de recrutement n’est pas non plus une garantie à 100% de ne pas faire d’erreur. Mon conseil, c’est de ne pas s’emballer trop vite pour ne pas être victime de ce genre d’escroquerie. »

Sophie Athlan-Gazet, DRH à temps partagé chez Wesk et Waoup

Sophie Athlan-Gazet a débuté sa carrière de RH, il y a vingt ans, dans une start up du secteur des fournisseurs d’accès internet et des éditeurs de jeux vidéo. Après douze ans au sein du service RH d’un grand groupe, elle a souhaité renouer avec l’univers des start up, avec, à chaque fois, comme défi de monter from scratch le service RH. Elle est actuellement DRH à temps partagé pour diverses entreprises, dont principalement Wesk et Waoup.

Source HelloWorkPlace

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