« Plus le confinement se prolonge, plus le redémarrage sera difficile »
Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé un prolongement du confinement jusqu’au 11 mai, puis un desserrement progressif, le président de l’Ordre des experts-comptables, Charles-René Tandé, explique les difficultés auxquelles les entreprises font face pour obtenir les aides de l’Etat. Beaucoup d’entre elles attendent encore de savoir si elles pourront obtenir de leur banque un financement garanti par l’Etat.
Nous pouvons distinguer deux catégories d’entreprises. Celles qui sont éligibles à l’aide de 1.500 euros, dont les critères restent néanmoins restrictifs. Le chiffre d’affaires doit être inférieur à 1 million d’euros et la rémunération (charges comprises) ne doit pas dépasser 60.000 euros. Finalement, peu d’entreprises peuvent en bénéficier.
Les autres devront faire appel au prêt garanti par l’Etat qui, cette fois, concerne tout le monde et peut atteindre 25 % du chiffre d’affaires. C’est considérable. Il est encore trop tôt pour voir quelle sera l’attitude des banques. Ce que je constate du côté de nos clients, c’est qu’ils ne se placent pas assez vite dans la démarche de demander des financements.
Oui, c’est notre principal sujet d’inquiétude. Certaines entreprises ont coupé des prélèvements de façon non négociée. Il faut absolument éviter cela, car après, il peut y avoir un effet domino sur l’ensemble des fournisseurs. Voilà pourquoi il est important que les entreprises aient recours au prêt garanti par l’Etat.
Les services étaient saturés au début, mais la situation rentre dans l’ordre. Nous avons observé peu de refus. Si c’était le cas, c’est parce que le dossier, rempli un peu dans la panique par certains employeurs, omettait d’expliquer en quoi leur entreprise subissait une baisse d’activité.
Oui, cela concerne les dirigeants et mandataires sociaux qui ne sont pas couverts par l’activité partielle. D’un point de vue juridique, l’accès au chômage partiel est impossible en l’absence de contrat de travail. Ceux qui ne sont pas dans les critères de l’aide de 1.500 euros peuvent se retrouver dans une situation difficile.
Il y a eu une inquiétude à un moment sur les versements de dividendes, lorsque Bruno Le Maire a dit que les dividendes seraient incompatibles avec les aides de l’Etat. Mais cette règle ne s’appliquera qu’aux grandes entreprises, de plus de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires et de 5.000 salariés. Les dirigeants des PME ou d’entreprises de taille intermédiaire pourront se rémunérer en dividendes, à condition que leur entreprise ait encore la trésorerie suffisante.
C’est une question délicate, car on rentre dans un arbitrage entre santé et économie. Or, la santé passe avant tout, les arbitrages doivent se faire selon la situation sanitaire. Ce qui est certain, c’est que plus le confinement se prolonge, plus le redémarrage sera difficile. Chaque semaine qui passe va favoriser de nouveaux dépôts de bilan.
Je ne parlerais pas de vague, mais on voit des entreprises qui réfléchissent à ce qu’elles vont faire. Certains de nos clients sont en attente d’une réponse de leur banque pour un financement garanti par l’Etat. Si la banque dit « non », ce sera le dépôt de bilan. Toute la question est de savoir si une banque doit continuer de prêter à une entreprise qui était déjà en manque de fonds propres avant la crise.
Oui, malheureusement, les comptes des PME françaises font ressortir des résultats trop faibles depuis longtemps, comparé à l’Allemagne où l’on voit des PME de taille plus importante et qui sont plus solides. Notre tissu économique souffre depuis longtemps d’une insuffisance de fonds propres qui ne s’arrange pas, malgré les baisses de charges sociales. Si on prend le parti de ne pas aider ces entreprises, au motif qu’elles étaient déjà fragiles avant la crise, nous verrons effectivement des vagues de faillite.
La première étape était d’avoir un report sur le dépôt des liasses fiscales. Nous sommes encore en attente des dates définitives. Il apparaissait nécessaire également de reporter les délais d’approbation des comptes afin de laisser le temps aussi aux commissaires aux comptes d’effectuer leur travail. Les entreprises disposent de trois mois supplémentaires pour réunir leur assemblée générale d’approbation des comptes.