Peut-on être licencié pour ses odeurs de transpiration ?

Licencier un employé en raison d'odeurs causées par une maladie relève de la discrimination. Si celle-ci est avérée, le conseil des Prud'hommes peut annuler la décision de l'employeur....

Peut-on être licencié pour ses odeurs de transpiration ?

 

Un salarié qui dégage une forte odeur de transpiration, c’est gênant pour tout son entourage professionnel, et en recrutement également.
Si cette odeur gêne les autres employés dans leur travail, l’employeur peut chercher à licencier l’employé gênant. En a-t-il le droit ?

Peut-on être licencié pour ses odeurs de transpiration ?

Manque d’hygiène : licenciement autorisé

Certaines personnes sentent la transpiration parce qu’elles ne prennent pas de mesures d’hygiène suffisantes : douche quotidienne, changement de vêtements, etc. Or :
Le Code du travail impose aux salariés de prendre toutes les dispositions nécessaires pour leur santé.
De plus, certains contrats de travail exigent des salariés une hygiène rigoureuse.
Ainsi, les employeurs peuvent trouver un fondement au licenciement pour des odeurs de transpiration.
Toutefois, pour être valide, la procédure de licenciement doit être menée avec de grandes précautions :
En effet, l’employeur doit avoir convoqué le salarié pour plusieurs entretiens discrets et respectueux dès la survenance du problème.
Des solutions doivent être envisagées avec l’employé.
En l’absence d’amélioration, un licenciement peut être envisagé.
À noter que cette procédure n’est envisageable que si la transpiration résulte vraiment d’un manque d’hygiène.
À noter : attention, les juges des Prud’hommes sont très sévères avec les employeurs qui engagent cette procédure. Se faire épauler d’un avocat dès le début des démarches est indispensable.
Un avocat spécialisé de votre région vous contacte et vous apporte son aide.
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Problèmes de santé : pas de licenciement !

Parfois, les odeurs de transpiration peuvent provenir non pas d’un manque d’hygiène mais d’un problème de santé :
Dans ce cas, une procédure de licenciement serait nulle.
Afin de déterminer si les odeurs corporelles viennent d’un problème de santé ou non, l’employeur doit inviter l’employé à se rapprocher du médecin du travail.
L’employé peut aussi voir son médecin de famille de sa propre initiative, afin d’éviter une procédure de licenciement irrégulière.
Si la transpiration excessive provient d’un problème de santé :
L’employé peut recevoir un traitement. Si celui-ci s’avère efficace, l’affaire est réglée !
À défaut de traitement, le salarié peut être déclaré inapte à son poste :
Cela n’est possible que si une hygiène irréprochable est absolument nécessaire pour mener à bien les tâches demandées.
En effet, un vendeur qui sent la transpiration, ce n’est pas bon pour le commerce !
Si les odeurs de l’employé l’empêchent d’occuper son poste actuel, l’employeur peut :
rechercher une solution de reclassement pour l’employé ;
engager une procédure de licenciement si aucun reclassement n’est possible.
À noter : dans tous les cas, l’employeur doit rester très discret. Il doit être attentif à ne jamais mettre l’employé dans une position embarrassante ou humiliante, devant ses collègues comme devant la clientèle.

Attention aux licenciements abusifs :
Transpiration excessive ? Il existe des moyens d’en venir à bout !
Un employeur ne peut pas licencier en toute liberté et sous tous les prétextes. Certains motifs sont abusifs et peuvent motiver une saisine des Prud’hommes.
Licencier un employé en raison d’odeurs causées par une maladie relève de la discrimination. Si celle-ci est avérée, le conseil des Prud’hommes peut annuler la décision de l’employeur.
Saisir le conseil des Prud’hommes nécessite de faire des démarches. Consultez nos fiches pratiques Réunir les documents nécessaires pour saisir le conseil des Prud’hommes et Déposer une demande de saisine au conseil des Prud’hommes.

 

La résiliation du contrat de travail est prononcée aux torts de l’employeur si le salarié rapporte la preuve des manquements graves qu’il impute à son employeur ; elle produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Madame X… connaissait des problèmes de transpiration qui incommodait ses collègues et les clients.

A la demande des employées, l’employeur avait parlé de ce problème à Madame X… lors d’un entretien privé.

Le contrat de travail contenait une clause obligeant la salariée à porter les vêtements HAIRCOIF en parfait état de propreté et à avoir une tenue, une coiffure et une hygiène corporelle irréprochable.

Lors d’un entretien individuel qui s’est tenu le 28 novembre 2006, l’employeur a fait remarquer à Madame X… qu’elle devait faire preuve d’une hygiène corporelle irréprochable et ne pas sentir la transpiration du fait du travail en contact proche avec la clientèle.

Ce fait ne caractérise pas un manquement fautif de l’employeur à ses obligations mais l’exercice de son pouvoir disciplinaire.

Cour d’Appel de Lyon, 13 mai 2011 n° 10/04210

***

La lettre de licenciement adressée à Madame X… comportait le motif suivant :

« Malgré plusieurs remarques et mise en garde de deux de nos responsables à votre égard, vous avez fait preuve d’un manque d’hygiène corporelle depuis votre arrivée dans notre entreprise.
Un tel comportement n’est plus tolérable ni pour vos collègues ni pour moi-même.
La gravité des faits qui vous sont reprochés vous fait perdre tout droit aux indemnités de préavis et de licenciement. »

En réalité, il est reproché à cette salariée l’odeur nauséabonde que, selon différents témoins, elle aurait dégagée en raison de sa transpiration.

Ainsi, Monsieur A…, chef de rayon, a attesté qu’ « une odeur forte de transpiration rendait son bureau inaccessible »

De même, Madame B…, chef de rayon, a fait état d’ « une forte odeur de transpiration ».

La Cour d’Appel d’Agen a considéré que cependant, il n’était pas démontré que cette odeur de transpiration ait eu pour cause certaine un manque d’hygiène.

En effet, Madame X… a produit un certificat médical précisant qu’elle « bénéficie d’un traitement spécialisé à visé anti-transpirante ».

Il s’évince dudit certificat que la transpiration dont parait souffrir la salariée a une cause médicale.

De plus, la salarié n’avait fait l’objet d’aucun avertissement ou reproche avant sa convocation à l’entretien préalable en vue de la rupture du contrat de qualification.

Dès lors, les faits prétendument constatés depuis le début de l’exécution du contrat de travail étaient incompatibles avec la notion de faute grave qui exige une réponse immédiate de l’employeur.

Dans ces conditions, Madame X… s’est vue attribuer des dommages et intérêts pour un montant supérieur aux salaires normalement perçus (7 mois) jusqu’au terme de son contrat à durée déterminée.

Cour d’Appel d’Agen, 18 novembre 2003 n° 02/00846

Eric Rocheblave

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