L'hôtellerie en panne de managers

Il y a urgence. La France veut accueillir 100 millions de touristes en 2020, contre 84 actuellement. Malgré le prestige des écoles Vatel (Paris, Lyon, Nîmes…).....

L’Hôtellerie en Panne de Managers

 

Très en vogue, les écoles hôtelières sont prises d’assaut. Mais la France manque de cadres de haut niveau pour l’hôtellerie et la restauration.

 

L'hôtellerie en panne de managers

 

Plus de 800 m² de cuisine d’apprentissage, une dizaine de salles de cours, un auditorium de 500 places, une école du vin, deux restaurants… S’il revenait sur terre, le baron James de ­Rothschild, banquier le plus riche du XIXe siècle, ne reconnaîtrait pas son château de Ferrières, à l’est de Paris. Khalil Khater le métamorphose en “école de l’excellence à la française” pour former, dès le mois de septembre, une quarantaine de bac + 3 en hôtellerie-restauration. Masters (bac + 5) et MBA sont promis pour 2016.

Pour réussir son pari, l’homme d’affaires d’origine libanaise, qui a démarré chez Indosuez avant de fonder Accelis, spécialisé dans les services aux établissements hôteliers, a mis 30 millions d’euros sur la table. En toute sérénité : “Ferrières sera rentable dans trois ans. Il y a une forte demande. Je reçois des bacheliers scientifiques qui souhaitent se lancer en cuisine.”

Les grands chefs médiatisés, de Paul Bocuse à Yannick Alléno, font rêver les jeunes Français. Ce métier autrefois réservé aux cancres incarne la garantie d’un job, la créativité et l’esprit d’entreprise. Chaque année, près de 1.500 jeunes sortent de la célèbre école Ferrandi à Paris, ainsi que 2.000 adultes en formation continue. “L’apprentissage fait partie de l’ADN de Ferrandi. Mais nous développons également l’enseignement supérieur en diversifiant les spécialités. Les effectifs postbac doubleront à terme”, précise le directeur, Bruno de Monte.

Il y a urgence. La France veut accueillir 100 millions de touristes en 2020, contre 84 actuellement. Malgré le prestige des écoles Vatel (Paris, Lyon, Nîmes…), Le Cordon Bleu (Paris), l’Imhi de l’Essec ou encore de Savignac en Dordogne, la France manque de formations de haut niveau à l’image des établissements suisses (voir interview). L’école hôtelière de Lausanne notamment est devenue l’équivalent d’une business school. Les diplômés peuvent aussi bien travailler dans l’hôtellerie-restauration que dans la banque, l’aérien… À Écully, près de Lyon, l’Institut Bocuse, qui fête son 25e anniversaire, affiche de fortes ambitions. “Nous souhaitons passer le cap des 620 étudiants en octobre, assure Gérard Pélisson, président de l’institut et cofondateur d’Accor. En 2005, nous avons créé le premier master en management international de l’hôtellerie et de la restauration, en partenariat avec l’université Lyon 3. Et trois ans plus tard, un centre de recherche ouvert aux doctorants. À la rentrée, nous ouvrirons un laboratoire consacré à l’accueil et au service, un aspect essentiel du métier.”

Les écoles essaiment à l’international
L’évolution est progressive, car le business model est vorace en capitaux. Une nouvelle cuisine coûte 270.000 euros, sans parler des achats de matières premières de qualité (vin, foie gras, truffe…). À l’exception de l’école Ferrandi, qui s’appuie sur la chambre de commerce et d’industrie de Paris, les frais de scolarité sont élevés : 18.000 euros annuels à Ferrières, 11.000 euros à Écully… La facture est encore plus salée pour les amateurs, critiques ou photographes culinaires, blogueurs venus de Chine ou du Brésil qui souhaitent assimiler le savoir-faire français. Le programme international de cinq mois chez Ferrandi coûte 20.000 euros ; trois semaines à Écully sont facturées 4.110 euros.

À l’affût de sources de revenus, les écoles essaiment à l’international. L’Institut Bocuse est ainsi présent à Shanghai depuis 2010. La palme revient au réseau Vatel avec une vingtaine d’implantations (Turquie, Russie, Canada…) en franchise ou en propre. Deux inaugurations sont prévues en septembre à San Diego en Californie et à Kigali au Rwanda. L’art de recevoir à la française n’a plus de frontières.

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