Grèves : les restaurateurs de Montmartre boivent le bouillon pour la Saint-Sylvestre

Grèves : les restaurateurs de Montmartre boivent le bouillon pour la Saint-Sylvestre

 

Les établissements de ce quartier touristique, isolé par le manque de transports  font les frais de la mobilisation contre la réforme des retraites, depuis le début du mois de décembre.

 

 Patrick Fracheboud, gérant de la Bonne Franquette, sur la Butte Montmartre (XVIIIe), a dû fermer son établissement les 23, 24 et 25 décembre faute de clients.
Patrick Fracheboud, gérant de la Bonne Franquette, sur la Butte Montmartre (XVIIIe), a dû fermer son établissement les 23, 24 et 25 décembre faute de clients. LP/Christine Henry
L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) a comptabilisé une baisse des réservations de 40 à 50% pour les hôtels à Paris depuis le début du mouvement de grève contre la réforme des retraites.

Fin d’année morose pour les restaurateurs de Montmartre (XVIIIe). Depuis le 5 décembre, début de la mobilisation contre la réforme sur les retraites, leurs tables sont désertées par les touristes. Ce mardi soir, ils craignent le coup de grâce pour le réveillon de la Saint-Sylvestre.

« Nous attendions 120 personnes. 20 % des réservations ont été annulées. Or ce sont les recettes du 31 qui permettent d’équilibrer le chiffre d’affaires de décembre qui, traditionnellement, n’est pas très bon pour les restaurateurs de Montmartre », soupire Patrick Fracheboud, gérant de la Bonne Franquette, institution installée à deux pas de la place du Tertre depuis la fin du XXe siècle et qui figure dans le livre sur les restaurants historiques de Paris publié tout récemment par Citadelles & Mazenod.

« Une dizaine d’annulations sur 70 réservations »

Même constat dans le cabaret voisin « Chez ma cousine », bien connu des amateurs de spectacles humoristiques. « Ce soir, pour notre dîner spectacle suivi de danse, nous avons eu une dizaine d’annulations sur 70 réservations. Cela représente 1000 € de pertes sur une seule soirée. Et nous risquons d’avoir de nouvelles désaffections d’ici ce soir », se lamente le propriétaire Xavier Dangueuger.

Les restaurateurs de Montmartre sont mis à rude épreuve depuis le début du mois de décembre. « Face aux manifestations et aux difficultés de circulation, les tour-opérateurs ont préféré se tourner vers d’autres destinations », explique le gérant de la Bonne Franquette qui a été contraint de fermer les 23, 24 et 25 décembre, faute de clients. « Toutes nos réservations avaient été annulées. Le personnel a pu se reposer et passer Noël en famille », se console le gérant.

Le propriétaire de Chez ma Cousine, lui, compte entre 600 et 700 annulations depuis le début du conflit. « Le 5 décembre, nous avons fait 0 couvert alors que nous attendions 270 clients. Les comités d’entreprise ont tous décidé de reporter leurs réservations après les grèves. La situation ne peut plus durer. »

Le 12 décembre dernier, jour de grande mobilisation, tous les établissements de la Butte sont restés fermés, à l’exception du cabaret qui n’a fait que 30 € de recettes ce soir-là.

« Montmartre est devenu un village gaulois isolé »

Il faut dire que le quartier n’est plus irrigué par les transports en communs. Les lignes 12, 13 et 2 qui le desservent habituellement sont à l’arrêt depuis le début du conflit. Même le funiculaire reliant les abbesses à la basilique ne fonctionne pas. « Montmartre est devenu un village gaulois isolé », déplore Brice Moyse, président de l’association des commerçants du quartier Lepic-Abbesses.

Après les attentats de 2015 et les manifestations des Gilets jaunes en 2018, qui ont privé Montmartre de ses touristes, les restaurateurs boivent une nouvelle fois le bouillon. Le patron de « Chez ma cousine », qui emploie une quinzaine de salariés estime ses pertes à plus de 100 000 € depuis le début de ce mois crucial. « Depuis que j’ai racheté avec mon frère Alexandre cette affaire à mon père, il y a deux ans, nous courons les charges. J’ai vendu un appartement pour réinjecter des fonds dans la société et cela ne suffit pas encore. Et mes salariés qui n’ont pas pu venu travailler font aussi les frais de ces grèves puisque ceux qui n’ont pas pu venir travailler faute de transports ont été obligés de se mettre en congés ou ne seront pas payés.»

Au pied de la Butte, l’ambiance est tout aussi morose. Les allées du marché de Noël sont désespéremment vides. Et les cafés, restaurants et boutiques de la rue des Abbesses n’ont pas autant de clients que d’habitude. « La situation est catastrophique. Les commerçants ont vu leur chiffre d’affaires baisser de 30 à 60 %. Les habitants sont partis pour les fêtes et les touristes qui font vivre le quartier ne sont pas venus. De nombreux commerces vont être en difficulté si le conflit perdure », s’alarme le président de l’association des commerçants du quartier Lepic-Abbesses. Seuls les commerces de bouche espèrent tirer leur épingle du jeu.

Prix en baisse et recrutements annulés

“Le réveillon s’annonce bien triste pour les hôteliers parisiens”, a regretté Laurent Duc sur franceinfo. Les hôtels n’arrivant pas à faire le plein, “les prix ont radicalement chuté”, explique Laurent Duc qui espère pouvoir bénéficier de “reports de charges dès le trimestre prochain, qu’il y ait un étalement.”

Autre conséquence, selon le représentant de l’UMIH, les hôteliers craignent de ne pas pouvoir avoir recours aux recrutements d’extras et aux prestations additionnelles prévues en temps normal pendant les fêtes. “Au final, ce sont des gens qui avaient prévus de gagner de l’argent pendant les fêtes, des étudiants par exemple, des intérimaires, qui n’auront pas de travail”, développe Laurent Duc.

Plus optimiste en ce qui concerne le reste de la France, il estime qu’avec la neige prévue avant les fêtes, les établissements hôteliers vont pouvoir compter sur une moyenne de “10% de clients en plus”“Il y a le côté merveilleux de passer Noël sous la neige donc finalement, les Français ou nos voisins étrangers, vont je l’espère remplir les stations cet hiver”, précise Laurent Duc.

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