Pertes liées au confinement : un restaurateur gagne sa bataille contre son assureur
La justice a donné raison à Stéphane Manigold qui réclamait la couverture de ses pertes d’exploitation pour son restaurant, fermé à cause de la pandémie.
Le tribunal de commerce de Paris a tranché, vendredi 22 mai, dans l’affaire la plus suivie du moment. Il ordonne à Axa d’indemniser le restaurateur parisien Stéphane Manigold au titre de ses pertes d’exploitation liées à la fermeture administrative d’un de ses établissements, du fait de la crise sanitaire. Par définition, ce type de couverture compense la baisse du chiffre d’affaires et doit permettre à l’entrepreneur de faire face à ses charges fixes en couvrant les frais généraux permanents (amortissements, impôts et taxes, loyers, rémunération du personnel, intérêts d’emprunt…). Cette assurance aide aussi à supporter certains frais supplémentaires consécutifs au sinistre.
Tout a commencé le 17 mars. Trois jours après la fermeture de ses quatre restaurants pour cause de pandémie, Manigold se tourne vers son assureur afin de bénéficier de la prise en charge de ses pertes d’exploitation. Ce quadra, dont les établissements avoisinent les 6 millions d’euros de chiffre d’affaires par an et comptent 52 salariés, est convaincu d’être titulaire de contrats multirisques, couvrant la totalité des pertes d’exploitation de ses établissements en cas de fermeture, même en pleine pandémie. Il se met à le dire tout haut, à faire à grand bruit, enchaînant les sorties médiatiques – RMC, CNews, TF1, etc.
Une conciliation qui n’a pas abouti
À l’entendre, l’assureur français se soustrayait à ses obligations contractuelles. Ce que réfutait Axa. La discussion tourne court. Fin avril, le chef d’entreprise décide de saisir le tribunal de commerce de Paris sur la situation d’une de ses quatre affaires, Le Bistrot d’à côté Flaubert, qui enregistre un chiffre d’affaires annuel de 350 000 euros. Stéphane Manigold, défendu par maître Anaïs Sauvagnac, assistée de Levent Saban et Didier Le Prado, a obtenu le versement, à titre de provision, de 45 000 euros, « sous astreinte de 1 000 euros par jour, à compter du 15e jour de la signification (de la décision), et ce, pendant soixante jours, période au-delà de laquelle il sera fait un nouveau droit. » La garantie perte d’exploitation pour ce restaurant est plafonnée à six mois, selon le contrat liant les deux parties.
Ces derniers jours, Axa avait tenté une conciliation avec Manigold, qui n’a pas abouti. Selon nos informations, une somme équivalente à 20 % du chiffre d’affaires hors taxe pour toute la durée de leur fermeture – cela étant capé à 4 mois – aurait été proposée à plusieurs restaurateurs, ayant le même type de contrat que Stéphane Manigold. Ce dernier est devenu en un éclair un serial restaurateur à Paris. Après avoir fait éclore Substance en octobre 2018 et Contraste en septembre 2019, il a passé la vitesse supérieure en quittant son poste de directeur des grands comptes chez Audi en mars dernier. Cet épicurien, passionné de champagne, s’est payé un bolide mythique en reprenant, fin décembre 2019, La Maison Rostang, deux étoiles au Guide Michelin, et sa table attenante Le Bistrot d’à Côté Flaubert.
Le secteur de l’assurance se mettrait en danger s’il payait un sinistre pour lequel personne n’a cotisé.
Depuis le début de la crise sanitaire, il fait figure de « héros » pour beaucoup d’artisans et de petits commerçants, remontés contre leur assurance, à qui ils réclament de couvrir leurs pertes d’exploitation. Sauf que ce type de garantie est très exceptionnel, pour les fermetures administratives, surtout en temps de pandémie. Beaucoup de professionnels avaient affirmé au Point, d’ailleurs, que Manigold profitait d’une « erreur de plume », d’un « contrat mal ficelé ». D’après l’ordonnance de référé, le « risque pandémique n’est pas exclu du contrat » signé entre Axa et Manigold. « L’interdiction de recevoir du public est bien une fermeture administrative totale et partielle du restaurant », indique également la décision de justice. Cinq mille à six mille contrats du même calibre que celui du restaurateur parisien seraient en circulation, via plusieurs sociétés de courtage, selon une source. Axa avance une estimation d’« une centaine de contrats. »
Dans une interview accordée au JDD le 5 avril, le PDG d’Axa, Thomas Buberl, soulignait qu’« une entreprise peut être assurée contre le risque de perte d’exploitation lié à une épidémie, même si c’est assez rare qu’une entreprise prenne ce type d’assurance. En revanche, nous ne pouvons prendre en charge toutes les pertes non assurées provoquées par le confinement. (…) Le secteur de l’assurance se mettrait en danger s’il payait un sinistre pour lequel personne n’a cotisé. »
Axa a fait appel de la décision. De son côté, Manigold penserait déjà à réclamer le même type d’indemnisation pour ses trois autres établissements. La bataille n’est pas encore terminée.
Les assureurs qui n’assurent plus
Il est triste et de plus en plus préoccupant de constater que les “Assureurs” même parmi les plus célèbres et les plus médiatiques ; ont de plus en plus tendance à réduire au maximum et jusqu’à la limite du procès judiciaire, leurs prestations vis à vis des plus humbles et n’ayant pour beaucoup, pas les moyens de payer un avocat… ! ” Toujours ça de gagné” devient semble-t-il leur devise… !
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Un contrat d’assurance…
Est binaire : Ou la clause figure au contrat ou pas. Premier cas on paye, deuxième cas, c’est dommage. Où est la difficulté ? J’ai assuré des matériels en location, des bâtiments et bureaux, des installations, je savais exactement ce qui était couvert et ce qui ne l’était pas. Si un matin nous découvrions un engin dégradé, tant pis pour nous. On payait la casse. Assurer notre parc propre aurait coûté, aprés étude, bien trop cher.