Salaire et motivation : nécessaire mais pas suffisant

Petit moteur que nous n’alimentons pas tous avec le même carburant. Le travail salarié est un échange socio-économique : des contributions contre des rétributions à la fois matérielles (salaire, bonus, avantages en nature,…) et immatérielles (intérêt du travail, autonomie, responsabilités, perspectives de carrière,…). Ce que chaque salarié, quel que soit son niveau hiérarchique, obtient en échange de son travail est un « mix » rétributions. Tous n’attachent pas la même valeur aux différents types de rétributions.

Salaire et motivation : nécessaire mais pas suffisant

La rémunération reste le principal sujet d’intérêt – et de mécontentement – des salariés français. De quoi renforcer les DRH et les directions générales dans leur choix d’utiliser cet outil de motivation. Mais attention, nous explique le consultant François Potier, s’en tenir à la dimension salariale constituerait une grave erreur.

Salaire et motivation : nécessaire mais pas suffisant

Le Baromètre EdenredIpsos « Bien-être et motivation des salariés » est formel : le pouvoir d’achat reste la principale préoccupation professionnelle des salariés. Sa dixième édition, qui a interrogé près de 13600 salariés dans 14 pays européens, montre en particulier que 49% des interrogés français placent leur salaire en tête de leurs préoccupations, devant le maintien dans l’emploi et la gestion de leur temps. Par ailleurs nos compatriotes ne se classent qu’en onzième position en Europe en matière de motivation.

Un contexte de modération salariale

Faut-il établir un lien avec la modération salariale dont font preuve les entreprises françaises ? En début d’année, une enquête d’Aon Hewitt nous apprenait en effet que les grandes entreprises européennes (plus de 500 millions de chiffre d’affaires) avaient décidé de revoir leurs augmentations de salaires à la baisse, passant de +1,9 % à +1,6 % en six mois, depuis l’été 2014. Même constat dans les plus petites structures, avec une « baisse de la hausse », de 2,7 % à 2,5 %. Les dirigeants français figurent parmi les plus économes d’Europe, avec des justifications portant sur le faible taux d’inflation, ou encore le contexte économique tendu. Une lésinerie qui trouve peut-être aussi sa source dans la grande stabilité des travailleurs hexagonaux, dont 57% déclarent dans le baromètre Edenred-Ipsos ne pas avoir encore songé à quitter leur entreprise actuelle.

Le management doit-il pour autant se satisfaire d’une situation où les attentes en matière de salaires sont importantes et où la motivation des troupes reste derrière celle des pays voisins ? La question mérite d’être reposée en ces temps de disette salariale, et la pyramide de Maslow – qui théorise les cinq étages de la motivation – questionnée à nouveau.

L’outil salaire n’est fait que pour la motivation à court terme

« Bien sûr, comme le dit Maslow, le premier étage de la pyramide, celui des salaires, est fondamental. C’est un socle, et la rémunération, selon lui, doit couvrir les besoins primaires du salarié, en conformité avec son efficacité, son investissement et en cohérence avec les prix du marché ». Mais François Potier, ancien DRH et consultant, qui vient de cosigner une tribune dans les Echos sur « la motivation, pot au noir du management » (avec Gilles Le Gendre et Laurence Borde), veut aller plus loin : « L’outil salaire n’est fait que pour la motivation à court terme. Sur le long terme, il peut même jouer un rôle inverse ».

La raison ? « Le salaire est regardé comme une arme fatale, ou magique, par le management qui, du coup, oublie de se préoccuper d’embarquer les collaborateurs, en donnant du sens à leur travail, en développant l’esprit d’entreprise, etc. ». Bref, selon le consultant, l’équation motivation = hausse de salaires (et seulement elle), est simpliste, voire dangereuse.

Les DRH ont-ils toutes les cartes en mains ?

Un avis pas si iconoclaste : « les DRH sont, globalement, en phase avec ce message. Mais quel pouvoir ont-ils réellement pour mener une politique de motivation complète ? Cela n’est possible que lorsque la direction générale partage avec eux une vision de long terme ».

François Potier conclut notre entretien : « il faut travailler sur le talent, et beaucoup de collaborateurs en ont. Seulement il faut vouloir et savoir le reconnaître d’abord, le déployer et le développer ensuite. Au passage, nous pourrions nous débarrasser du terme de Ressources Humaines, pour parler plutôt de Ressources des Hommes. En restant centré sur les salaires pour la motivation, on passe évidemment à côté de tout ce champ. Et, surtout, comment fera-t-on pour attirer les nouvelles générations qui sont moins sensibles à l’argument de la rémunération, surtout si elle est le prix d’une façon de travailler qu’ils exècrent ? »

 

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