Histoire de la toque de Cuisinier

Histoire de la toque de Cuisinier

 

Tombante, puis droite comme un ‘I’, la toque a gagné ses lettres de noblesse au 19e siècle et continue de séduire les cuisiniers jusqu’au Japon.

Histoire de la toque de Cuisinier

D’ou vient la toque de cuisinier ?

Une des choses les plus importantes dans la cuisine, c’est la tradition. Que ce soit les techniques pour préparer ou cuire un plat ou l’uniforme du cuisinier, tout a une Histoire. Ainsi rentrer dans une cuisine c’est un peu retrouver plus de 2000 ans de tradition et d’histoire.

 

Les origines :

La légende veut que 7 siècles avant notre ère, les cuisiniers du Roi de l’Assyrie portaient des chapeaux en forme de couronne qui les différenciaient des autres aides de cuisine. Pourquoi ? Il semble que les rois ont été empoisonnés par des cuisiniers mécontents. Aussi pour les apaiser et pour leurs donner plus d’importance, ils ont été autorisés à porter un uniforme bien particulier (qui les distinguait des autres employés de la cuisine) avec un couvre-chef en forme de couronne en tissu. La toque de chef était née !

Autre mythe sur l’origine du chapeau des cuisiniers : les organisateurs de festins durant l’Antiquité gréco-romaine coiffaient les maîtres de cuisine de bonnets ornés de feuilles de lauriers pour marquer le début des festivités. Une troisième légende veut que la toque constitue une copie du couvre-chef des prêtres orthodoxes grecs. Au 6e siècle, dans l’Empire romain d’Orient, durant une période de troubles politiques, de nombreux cuisiniers se seraient cachés dans les monastères pour survivre et auraient alors repris l’habillement des moines, dont le chapeau cylindrique noir, si caractéristique (‘kamilavkion’)1.

Dans le même temps, les chefs cuisiniers consacraient beaucoup de temps à lire et à étudier pour découvrir de nouvelles recettes et pour parfaire leurs techniques. Comme peu de gens savaient lire et écrire à cette époque, ils étaient donc considéraient comme des savants ou des magiciens. Malheureusement, être savant et cultivé n’était pas une protection, et comme de nombreux intellectuels, les cuisiniers lettrés ont été persécutés. Ces chefs ont cherché refuge dans l’église orthodoxe grecque. Ils ont alors enfilé la garde-robe des moines : la soutane et la toque des moines orthodoxes. La toque des chefs d’Assyrie a de nouveau évolué pour s’inspirer de la toque des moines.

Histoire de la toque de Cuisinier

Réalité ou fiction?

Un courtisant du Roi Henry VIII raconte que lorsque le Roi Henri a trouvé un cheveu dans sa soupe, le Roi, a pour ainsi dire perdu la tête. Ou plutôt, quelqu’un d’autre l’a perdu. Le propriétaire du cheveu, un cuisinier, a été décapité, et son remplaçant a été poliment prié de porter un chapeau pour éviter que cela se renouvelle. Ainsi depuis cette époque le port d’un couvre-chef en cuisine s’est généralisé.

En France, jusqu¹au XVIIe siècle, les cuisiniers portaient des couvre-chefs, c’est le cas de le dire, de taille et de couleur différente suivant leur rang dans la hiérarchie. Mais au XVIIIe siècle, le fameux chef Antonin Carème trouva que toutes ces variantes faisaient désordre. Il ne voulait voir qu¹une seule couleur, et une seule forme.

Carème fut le premier chef à se faire appeler “chef”. Il a été au service de Talleyrand , qui avait pour ordre de la part de Napoléon de recevoir toute l’Europe à sa table. Puis Carème parcourt l’Europe, justement, demandé par toutes les cours.

En 1821, il est au service de Lord Charles Stewart , en Autriche. Les bonnets de coton blancs utilisés jusque là ne le satisfont plus. Ils manquent de rigueur. Trop mous (reconnaissons qu’ils ressemblaient davantage aux bonnets des Schtroumpfs qu’à la Tour de Pise !), il imposera la toque.

Dans quel but ?

Pour ventiler le haut du front et le crâne qui transpirent dans la chaleur des cuisines.

Pour la rigidifier, il fait placer à l’intérieur un morceau de carton pour
qu’elle se dresse avec majesté. De nos jours, le carton a été remplacé par de l’amidon, mais le principe reste le même.

Auguste Escoffier (1846-1935) rationalise la répartition des tâches et promeut l’image d’une équipe à la tenue et au comportement irréprochables. La toque devient droite et complète l’uniforme du cuisinier, composé d’une veste blanche à deux rangées de boutons, du foulard, du tour de cou, du tablier et du pantalon rayé. « La toque droite et l’ensemble de la tenue d’une blancheur impeccable sont synonymes de droiture morale, de propreté et visent à inspirer confiance aux clients des restaurants. »

 

Un bonnet dans des cuisines suffocantes

Jean Vitaux et Benoît France soulignent, dans leur Dictionnaire du gastronome, l’usage d’une tocaespagnole, sans bord et de forme cylindrique, au 15e siècle. Puis, à la sortie de la Renaissance, les deux passionnés français de la gastronomie notent le port par les cuisiniers européens, traiteurs et rôtisseurs, de bonnets similaires à des bonnets de nuit2.

« Souvent noir et en coton, le bonnet recouvrant la tête des cuisiniers devait éponger la sueur de ces derniers, qui travaillaient dans des milieux suffocants, noircis par la braise des cheminées, explique Jérémie Brucker, chargé de cours en histoire contemporaine à l’Université d’Angers en France, auteur d’une thèse sur l’histoire des vêtements professionnels, dont ceux des cuisiniers. Ce couvre-chef avait aussi pour but d’empêcher les cheveux de tomber dans les plats et de protéger d’éventuels impacts. » L’objectif du bonnet était avant tout hygiénique et fonctionnel.

 

Ajouter un peu de mode.

Avec toutes les variations des chapeaux portés par les chefs du Monde entier ( bonnet écossais en Angleterre, bonnet de laine en Espagne, bonnet à gland en Allemagne, ou bonnet de coton en France), un peu de créativité et de design ont été nécessaires pour obtenir les chapeaux en tissu blanc, aussi connu comme Toques Blanches, auxquels nous sommes habitués aujourd’hui. Dans les années 1800 en France, un chef nommé Marie-Antoine Carême (1784-1833) a décidé que les chefs méritaient un uniforme spécifique. Il choisit le blanc comme couleur, signe de propreté dans la cuisine. Et il imposera des hauteurs de toques différentes selon le grade dans la cuisine, le Chef cuisinier portera le chapeau le plus haut.

 

Combien de plis avez vous?

Les plis qui composent la toque de cuisinier sont aussi imprégnés d’une histoire riche. La tradition veut que plus la toque du chef contient de plis, plus il maitrise les techniques culinaires. Ainsi, un chef avait 100 plis dans son chapeau pour signifier les 100 façons qu’il connaissait pour préparer des œufs. Les toques aujourd’hui n’ont pas tant de plis, mais la légende perdure.

 

Et aujourd’hui  ?

Aujourd’hui, certaines écoles de cuisine japonaises promeuvent l’usage de la toque à l’européenne auprès de leurs étudiants. De nombreux chefs arborent toutefois une tenue complètement différente de l’uniforme occidental. Ainsi, les maîtres sushi, ‘itamae’, qui ont étudié des années durant auprès d’un chef pour obtenir ce titre tant convoité7, privilégient encore souvent une tenue nipponne traditionnelle. Ils portent une veste kimono et un bandeau appelé ‘hachimaki’, fait de la torsion d’un tissu absorbant en coton (‘tenugui’), orné du nom de famille, d’un slogan ou imprimé de motifs divers. « On trouve en effet ces deux pièces d’habillement dans les restaurants spécialisés dans la cuisine japonaise, qu’ils soient luxueux ou populaires », relève Joji Nozawa. Dans les esprits japonais, le bandeau ‘hachimaki’ symbolise non seulement un travail pénible, faisant transpirer, mais aussi la détermination et le courage.

Tête nue, bandana ou casquette de baseball sur le crâne, plusieurs cuisiniers en vogue ont fait le choix d’abandonner la toque pour marquer leur différence. C’est par exemple le cas de l’Anglais Jamie Oliver ou de l’Allemand triplement étoilé Thomas Bühner, qui se montre rarement en tenue traditionnelle. « Au Japon, il existe aujourd’hui beaucoup de restaurants assez variés, où les cuisiniers s’habillent librement », indique Joji Nozawa.

 

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