15 conseils pour séduire l’inspecteur du guide Michelin

Mais peut on réellement séduire un inspecteur ou une inspectrice du célèbre guide michelin ?

15 conseils pour séduire l’inspecteur du guide Michelin

Mais peut on réellement séduire un inspecteur ou une inspectrice du célèbre guide michelin ?

 

Certes, il faut d’abord bien faire à manger. Car l’assiette seule, et elle seule, qui constitue l’alpha et l’oméga de l’inspecteur Michelin. N’en doutons pas. Mais un chef averti en vaut deux et quelques conseils ne peuvent nuire pour obtenir ou garder ce précieux sésame qu’est l’étoile. Voilà donc en quinze conseils le petit guide du parfait chef étoilé.

 

15 conseils pour séduire l’inspecteur du guide Michelin

1/ Reconnaître l’inspecteur à son allure

. Un collègue vous a prévenu qu’un inspecteur Michelin était dans la région, vous êtes sur vos gardes. Malheureusement, sa description physique est d’un banal absolu (« VRP de province… ») et il n’a pas eu le temps de retenir la plaque d’immatriculation de la Peugeot gris anthracite qui a tourné trop rapidement au coin de la rue. Quelques éléments pour vous aider :

. Très majoritairement, il s’agira d’un homme. Certes il y a la directrice du guide, Juliane Caspar (sa photo traine sur le net…), l’escouade d’inspecteurs est largement masculine.

. Il y a des jeunes (35 ans) et des moins jeunes. Des rondouillards et des « secs ». Bien difficile d’identifier physiquement un inspecteur. Certains chefs expliquent qu’ils les reniflent à dix kilomètres. S’ils le disent…

. Il ne mange ni plus vite, ni plus lentement que la moyenne. Non, l’inspecteur ne fait pas trois déjeuners dans trois adresses différentes la même journée. Il est un client lambda, banal, sans relief. Comme vous. Et moi.

2/ Reconnaître l’inspecteur à sa méthode de travail

. Il mange généralement seul. Si le journaliste vient souvent accompagné, l’inspecteur voyage seul. S’ils sont deux, c’est qu’il y a anguille sous roche. C’est souvent le cas pour les établissements deux ou trois étoiles. Pour l’anecdote, chaque inspecteur réalise alors son « essai de table » dans son coin, sans se laisser influencer par les avis de son confrère. Du coup, à table, ça cause de tout sauf du repas. Là encore, l’inspecteur se distingue du journaliste ou du blogueur.

. Si nos inspecteurs agissent en binôme, il y a un truc imparable. Si l’un choisit la carte et l’autre un menu, c’est un indice de poids pour les reconnaître…

. C’est la règle : l’inspecteur ne prend pas de notes. Il se distingue du journaliste comme du blogueur qui mitraillent avec l’Iphone et notent à tout va sur le petit calepin offert par une attachée de presse. Quand le repas est composé d’une multitude de petits plats, il a son truc à lui : il va aux toilettes, sort ses fiches, note les plats déjà engloutis. Il se lave la mémoire, les mains et retourne à table l’esprit libre.

3/ Laisser travailler l’inspecteur en paix

Vous l’avez reconnu !? Tant mieux mais n’en montrez rien. Et pour au moins deux raisons :

. L’anonymat est sa force, il en est fier. S’il s’aperçoit qu’il est démasqué, il sera en rogne car il aura le sentiment de bâcler son travail. Du coup, il compensera cette erreur en surjouant son rôle : il sera encore plus exigeant et ne pardonnera pas la moindre imprécision qu’il vous fera payer cash. Sachez-le.

. Annoncer à votre équipe la présence du Michelin, c’est vous assurer un service catastrophique. Panique en cuisine, stress en salle, en faire trop ou pas assez, offrir le café, le digestif… Vous l’avez reconnu, gardez-le pour vous, suez en silence et tout le monde sera content.

4/ Sortir nappe, argenterie et panière ?

Ca, c’était avant. Si l’inspecteur apprécie toujours les bonnes manières, il change avec le temps et assouplit ses exigences.

. La nappe ? Elle n’est plus obligatoire pour tâter l’étoile. On ne compte plus les étoilés avec des tables en bois brut. Certains clients aiment, d’autres n’apprécient pas. L’inspecteur, lui, ferme les yeux sur ce dénappage si tendance.

. L’argenterie ? A ranger au placard. Préférez une fourchette tendance et un couteau qui coupe ce qu’il y a encore à couper, et cela fera l’affaire.

. Le pain ? A chacun son style. Un deux étoiles à Honfleur s’est fait tancer par certains clients qui n’en revenaient pas de voir un pain entier arrivé sur table, avec le couteau planté dedans. L’inspecteur, lui, apprécie cette convivialité s’il y a une cohérence dans tous les codes… Voilà le maître mot : la cohérence du concept.

. Reste les toilettes. Si l’histoire de la troisième étoile obtenue par Paul Bocuse l’année où il a refait ses toilettes est aussi célèbre que fausse, il s’est longtemps dit qu’il fallait au moins deux portes entre les toilettes et la salle à du restaurant pour obtenir l’étoile. En réalité, c’est surtout la législation qui l’exige. Il y a quelques années, un inspecteur a mangé à moins de trois mètres des toilettes (avec une seule porte !), l’a gentiment fait remarquer à la chef. Quelques mois après, l’étoile promise tombait dans son escarcelle.

5/ Répondre juste ce qu’il faut à un inspecteur

Mince, fin de repas, la salle se vide et l’inspecteur se lève, sort sa carte Michelin tel l’inspecteur La Bavure. L’instant de vérité est arrivé. Vous pouvez toujours lui demander s’il a bien déjeuné, ça ne mange pas de pain et c’est un signe de bonne éducation. Pour le reste, il y a de vraies cartes à abattre à ce moment-là de l’histoire. Voilà ce qu’il faut dire :

. Vous êtes là et bien là : un chef qui ne bouge pas est la première garantie pour viser l’étoile. Assurez-lui que vous serez encore là dans cinq ans, midi et soir, pour ravir vos convives. N’en démordez pas !

. Vous investissez mais pas trop : j’aime ma maison comme elle est, nous avons des projets pour la rendre plus belle encore, rien de déraisonnable et cela se fera, étoile ou pas étoile. L’inspecteur aime entendre cela car il n’en peut plus d’entendre que « son » guide est responsable d’investissements incontrôlés pour gagner des étoiles. L’assiette, rien que l’assiette vous répondra-t-il. Mais une salle plus belle encore ne peut nuire.

. Les opportunistes expliqueront à l’inspecteur qu’il leur manque l’édition du guide Michelin 1949, 1964 et 1981 pour avoir la collection complète, commencée par l’arrière grand-père qui connaissait Edouard Michelin en personne. A chacun son truc pour essayer de se mettre le Bibendum dans la poche…

6/ Monter à Paris pour rendre visite au siège du guide

Il y a là deux écoles. Ceux qui pensent que monter à Paris pour rencontrer un membre de l’équipe du guide rouge sert à quelque chose. Et les autres, qui en doutent. Ce qui est certain, c’est que vous n’y apprendrez rien. Ou si peu. On vous dira que le courrier est abondant, qu’il est plutôt favorable ou défavorable. Et vous repartirez avec le doute en bandoulière. A faire, une fois de temps en temps, mais en connaissance de cause.

7/ Se faire conseiller par… un ancien inspecteur

L’inspecteur Michelin est un sportif de haut niveau. Certes, il n’est pas toujours de prime jeunesse, mais il enchaîne les tables comme le marathonien avale les kilomètres. Tôt ou tard – et de plus en plus tôt à en croire le turn-over actuel chez les inspecteurs -, il quitte le navire pas toujours frais mais encore alerte. L’inspecteur doit donc se reconvertir. Et il sait que son expérience chez le Bibendum a de la valeur. Certains la vendent d’ailleurs fort chère, arguant d’une connaissance aigüe des fameux critères pour obtenir la si précieuse étoile. Après l’anonymat inspectoral, l’ex-Michelin clame haut et fort sur certains sites de rencontres professionnels son glorieux passé.

15 conseils pour séduire l’inspecteur du guide Michelin

8/ Est-il encore possible d’épater un inspecteur du guide Michelin ?

N’en démordez pas, un inspecteur, ça s’épate. Certes, blasé, il l’est car il enchaîne les popotes mais il ne faut pas oublier que notre bibendum ambulant n’accumule pas les étoilés comme d’autres enfilent les perles. Un étoilé, ça reste un grand moment et une exception dans son parcours annuel. Si la base de données du Michelin compte plus de douze mille adresses, et que le guide papier en extrait une petite moitié, la France compte moins de six cents étoilés. Tout cela pour dire qu’il arrive dans ses petits souliers quand l’étoile brille… Et n’oubliez pas que, souvent, l’inspecteur commence sa tournée par les étoilés, histoire de faire quelques repas dans le meilleur anonymat possible. Votre hôte a donc faim…

9/ Pour l’épater, dois-je tout miser sur un plat ou deux ?

L’assiette, rien que l’assiette, voilà votre mantra. Sauf que, dans la page recto-verso que l’inspecteur va remplir concernant votre établissement – son « essai de table -, la notation des plats ne prend que quelques lignes… Passons sur ce paradoxe. Chaque plat est noté de façon indépendante, selon une grille relativement simple, allant de la sous-étoile jusqu’à trois étoiles. A chaque fois, votre plat peut être étoile plus ou moins. Ainsi, l’entrée peut être une étoile, le poisson deux étoiles plus, la viande deux étoiles moins. Vous suivez ? Simple comme bonjour. Quant à savoir si l’inspecteur sort ensuite sa calculette pour connaître la moyenne statistique, disons que la grille constitue plus un indicateur qu’une vérité mathématique. Bien évidemment, la régularité dans la qualité de vos plats fera la différence. Un plat à trois étoiles et deux plats qui plafonnent à une étoile moins embarrasseront l’inspecteur. Si tel est le cas, attendez-vous à une autre visite dans l’année. En attendant, travaillez la cohérence qualitative de vos assiettes !

10/ Ecrire, faire écrire, et écrire encore

Voilà un conseil à garder pour soi. Le Michelin raffole des courriers des lecteurs. Mieux, le Bibendum a son service courrier – plusieurs employés y sont entièrement dévoués -, avec archivage, lettres de remerciements et, pour les plus fidèles, un guide envoyé chaque année comme récompense de leurs fidèles missives. Plusieurs lettres positives et un inspecteur peut être dépêché en urgence si le jugement de l’année a été plutôt sévère. Et inversement. Alors, le conseil est simple : demandez à vos heureux clients d’écrire au guide ; aux autres, muselez-les ! Mais attention, le Michelin est un fin limier. Il décèle vite la supercherie. Et, alors, bien évidemment, le stratagème se retourne contre vous. Écrire, oui, mais avec intelligence.

11/ L’inspecteur est passé, repassera-t-il ou pas ?

Chaque année, les inspecteurs discutent de leur terre d’élection pour les tournées à venir. A toi la Lozère, à toi la Corse, à moi la Bretagne. Ca négocie, ça se chamaille et ça part en vadrouille pour quelques semaines. Pour des raisons statistiques évidentes, les établissements ne sont pas visités chaque année, à l’exception des étoilés. Mais une fois passé, l’inspecteur repassera-t-il ? Oui et non. Désolé pour cette réponse de Normand. Au fait, si vous n’avez pas encore l’étoile, le Michelin ne passe vous voir que les deux ou trois ans. SI vous voulez vous faire remarquer, changez quelque chose : la décoration, le chef, la carte de fond en comble, que sais-je encore. S’il y a changement – ou hésitation sur la bonne notation (cf le point 9) -, attendez-vous à revoir la trombine d’un inspecteur entre septembre et fin octobre. C’est l’époque des « tournées de ramassage » : on refait des adresses pour contrôler l’avis de son collègue. Si c’est votre cas, c’est qu’il y a un « truc », positif ou négatif. A vous d’avoir du pif.

12/ Apprendre la langue de Shakespeare

Yes, you can ! Voilà probablement le conseil le plus évident et le moins important. Parler la langue de Shakespeare n’est pas un critère, juste un petit plus qui peut bien servir à l’occasion. Et attention, il y a des inspecteurs à l’accent anglais. Cela s’est déjà vu. L’inspecteur peut revêtir n’importe quelle tenue, et même parler anglais. Et Goethe dans tout ça ? Ne l’oubliez pas non plus puisque la rédactrice en chef du guide France est née outre-Rhin. Polyglotte le rouge !

13/ Se préparer à la deuxième étoile

Ce n’est pas l’enfer, mais…. Votre équipe en cuisine va se monter le bourrichon, vous vous dites qu’il va falloir investir dans la décoration, les arts de la table, qu’un voiturier est nécessaire, qu’il faut changer de fournisseurs de sel, voire de poivre, etc. Non ! Votre deuxième étoile, vous l’avez eu pour ce que vous avez déjà réalisé, pas pour une éventuelle amélioration de je ne sais quoi. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire, mais n’appelez pas votre banquier pour négocier un prêt dès l’annonce de la précieuse récompense. Certains y ont laissé un bras… En revanche, préparez-vous à recevoir dans votre restaurant les emmerdeurs et les empêcheurs de tourner en rond, ceux qui vont vous tester et voir s’il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Briefez votre staff en salle : « soyez polis et gentils, même avec les cons. ». Et fixez une limite claire. Ceux qui dépassent les bornes, un bon coup de pied au cul et dehors. D’autres prendront leur place.

14/ Savoir fermer ses esgourdes en janvier

Ah les rumeurs… Rumeur rime avec malheur. Ne l’oubliez pas. Pourtant, chaque année, le petit monde des professionnels et des bavards cherchent à savoir qui seront les heureux élus. Chacun y va de son petit pronostic, on se vante de savoir qu’untel va avoir la deuxième ou la première étoile, on se glorifie de savoir… Sauf que très peu de personnes savent… Parler n’est pas savoir ! Et que la faiblesse humaine fait que l’on a tendance à croire ce qui se dit. Malheur à celui qui ne s’y retrouve pas quand le communiqué officiel sort… Fermez vos esgourdes au maximum et attendez la sortie du guide. Là, et seulement là, sortez les bulles ou achetez des anxiolytiques.

15/ Gérer la perte d’une étoile

La tuile… Plusieurs possibilités. Si vous avez été averti de la perte de l’étoile, vous pouvez dénoncer le système et simplement dire que vous avez demandé le retrait de l’étoile car vous ne vous reconnaissez plus dans le « système ». Cela a déjà été fait. Avec talent. Si cela est dû à un changement de chef, communiquez !!!! Et faite savoir que « la qualité n’a pas baissé, mais le Michelin fonctionne ainsi quand un nouveau chef arrive. » Ca atténue la perte… Et si seule la qualité de l’assiette explique la perte de l’étoile, alors n’en parlez pas trop. Vous, et vous seul, savez ce qu’il faut changer pour repartir de l’avant. Et que tous les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Au final, Michelin ou pas, le seul juge reste le client. C’est lui qu’il faut satisfaire tout l’année. Voilà bien là la seule vérité incontestable. A ne jamais oublier !

Franck Pinay-Rabaroust

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